« Trouver. Perdre. Est-ce vous avez bien réfléchi à ce que c'est que la perte ? », demandait le poète Rainer Maria Rilke à un jeune enfant, qui deviendra le peintre Balthus. Ce dernier, quelques jours après avoir trouvé un chat qu'il nomma Mitsou, le perdit. Nos villes sont hantées de petits panonceaux désespérés, descriptifs d'une familiarité généreuse, lançant un avis de recherche après la perte d'un chat. Perdre est un arrachement à ce à quoi nous tenons et également à ce qui nous fait tenir. Trouver et perdre sont les deux faces d'une même expérience : qu'est-ce qui nous appartient, qu'est-ce que la possession ? Car si on peut se croire propriétaire d'une chose inanimée, on ne peut l'être d'un vivant, à commencer par un chat, sauf à le réduire au rang de chose. Sa perte fait éprouver qu'il y a de l'inappropriable. « Il faut un chat pour nous enseigner ce mystère un peu douloureux […]. Tous les objets, tous les êtres sont des chats. Ils arrivent et s'en vont1. »

L'Évangile aussi ne cesse de raconter des pertes d'animaux. Il y est question notamment de brebis, dont la perte comme les retrouvailles ont une portée vitale : avoir été perdues et avoir la joie de s'être laissées re-trouver. In-quiétude cependant : comment vivre tranquillement lorsque le vivant dont on a la charge a disparu, exposé à l'inconnu, prometteur et menaçant à la fois ?

Dans d'autres récits encore, ce n'est plus Jésus qui expose des pertes mais qui s'expose à elles : se perdre dans une caravane de retour de Jérusalem ou perdre son ami Lazare. Il y découvre l'épaisseur de l'incarnation et le jeu de sa liberté. Perdre un enfant, perdre la confiance en la vie qui ne reconnaît plus la vie en soi dans le handicap ou la maladie chronique, c'est être amputé, à chaque fois, d'un je-ne-sais-quoi qui, pourtant, rendait vivant. S'y creuse le vide que laisse le manque