« Un feu qui en engendre d'autres1. » Voilà l'image que les jésuites réunis en Congrégation générale, en 2008, ont employée pour décrire le dynamisme qui soutient la Compagnie de Jésus depuis sa naissance. Cette propagation par contact, qui a traversé les siècles et qui a atteint les endroits les plus reculés de la planète, eut sa première impulsion à Paris chez un petit groupe de jeunes étudiants qui se serrèrent autour d'un autre étudiant moins jeune, appelé Ignace. Les écrits qui témoignent de ces réunions – le Récit du Pèlerin ainsi que les mémoires des premiers compagnons – ne laissent pas de doutes : c'était chez Ignace que s'était déclenché le processus de combustion qui, graduellement, impliqua et agrégea ces jeunes hommes. D'ailleurs, quelqu'un pourrait voir, dans cette étincelle première, l'accomplissement d'une aspiration, gravée même dans son nom « Ignace », adopté au temps des études parisiennes, par assonance avec son nom de baptême « Iñigo » et par dévotion envers le martyr d'Antioche, tire ses origines du mot latin ignis, qui signifie précisément « feu »2.
Or, faut-il estimer qu'Ignace a été le seul détenteur de ce feu et que la Compagnie de Jésus en a eu l'exclusivité ? Sans doute pas. Combien d'hommes et de femmes, animés par des grâces mystiques ou investis par des charismes de fondation, ont ouvert des voies inédites à des moments cruciaux de l'Histoire ! Et encore, combien de personnes inconnues, avec une patience exemplaire, ont été signes d'éternité au cœur du quotidien3 ! Ce qui fait la spécificité d'Ignace, donc, ce n'est pas tant ce feu en lui-même que la