« La crise n'est pas le déclin. » Ouf, nous voici rassurés… ou presque ! Il aura tout de même fallu au lecteur attendre la page 316 d'un descriptif, fort bien documenté et accessible, de ce qui ressemble à une lente descente… aux enfers de l'institution ecclésiale, pour trouver un peu de répit et de réconfort. Jusque-là, cela secoue. À commencer par cette épiphanie du 15 avril 2019, l'embrasement de Notre-Dame de Paris. Oui, notre Église brûle et nous préférons bien souvent détourner le regard, semble nous dire le fondateur de la communauté Sant'Egidio. L'historien de l'Église commence par faire œuvre utile en nous rappelant, au travers d'un large panorama européen, que bien des phénomènes observés aujourd'hui au sein de l'Église (sécularisation, baisse continue de la pratique et des vocations, affrontements internes, place de la Curie et du Vatican, etc.) trouvent leur origine dès les années 1950, voire le début du XXe siècle. Le concile Vatican II, qui se voulait une réponse (indispensable) aux immenses défis pastoraux et théologiques, ne pouvait enrayer des mécanismes fortement déterminés par les bouleversements anthropologiques et sociologiques. Le mot de rupture (entre Église et société) n'est pas trop fort, d'autant plus du fait de l'essence même du christianisme, une « religion historique » (Marc Bloch).

Selon l'auteur, c'est précisément le manque de culture historique dans l'évaluation des phénomènes de la part des instances ecclésiales qui a creusé le fossé dont la béance vertigineuse nous sidère aujourd'hui. La lecture des « signes des temps » peut parfois être parasitée par des « exceptions », comme le pontificat de Jean Paul II, marqué d'un indéniable charisme et d'une résonance historique particulière. Mais celui-ci s'est achevé « sans bilan, ni réflexion pour l'avenir ». À l'inverse, le souhait du pape actuel est bien d'inscrire l'Église dans un mouvement permanent d'adaptation, avec la volonté d'un dialogue plus égalitaire avec la société contemporaine. En définitive, l'agonie n'est pas la mort, mais une « lutte » permanente, « un combat pour le monde et dans le monde », « une manière de faire comprendre qu'on est vivant », bref un continuel renouvellement. Certes Notre-Dame a brûlé… mais elle est encore debout ! Sûrement un signe.