Lors d'une rencontre entre sinologues et intellectuels chinois, plusieurs sinologues, évoquant les raisons de leur engagement dans la tradition chinoise, décrivirent une expérience qui est aussi la mienne. Loin d'être appauvrie par l'exposition au texte étranger, la lecture de « son » texte en ressort enrichie. Le passage par la lecture des classiques confucéens a été, en ce qui me concerne, un chemin d'approfondissement du texte biblique et de la foi chrétienne. L'intuition augustinienne d'une image de Dieu à contempler dans l'âme rationnelle a ainsi été pour moi enrichie au contact des Classiques chinois qui mettent en avant la continuité de matériau – non de matière – dont le vivant est fait1. Autrement dit, le passage par la Chine fait revisiter une anthropologie chrétienne qui met parfois trop en valeur deux discontinuités : celle entre le corps, la sensibilité, l'imagination, la mémoire et l'intellect, d'une part, et celle entre l'être humain et le reste du vivant, d'autre part.
Cette mise en dialogue de trois textes, le texte biblique, le texte étranger et l'histoire, toujours inachevée, de sa propre âme, n'est pas un phénomène dont il est possible de rendre compte de manière naïve. Comme le rappelle, dès ses premières lignes, le Livre de la Voie et de la Vertu (Daodejing), « un logos [dao] qui peut être prononcé [dao] n'est pas un vrai logos [dao] » et Confucius s'est abstenu de