Trad. C. Longeval. Desclée de Brouwer, coll. « Chnstus », 2002, 460 p., 27,50 €.

Le P. Jalics, jésuite hongrois, anime un centre spirituel près de Nuremberg Après avoir enseigné la théologie en Argentine tout en partageant la vie des bidonvilles de Buenos Aires, il fut séquestré en 1976 par un groupe militaire d'extrême droite. Cet événement a changé sa vie. Depuis 1978, il donne des retraites d'initiation à la contemplation.
Justement convaincu que le moi profond est habité par la présence de Dieu, et remarquant la difficulté de prier chez de nombreux chrétiens pourtant formés à l'oraison, Franz Jalics propose un chemin de contemplation par l'exercice des sens, la respiration, le silence du raisonnement et la prière du Nom de Jésus. Il accompagne ses retraitants, au long de dix étapes, vers la conscience intime du réel, qui est la présence aimante de Dieu. Un chemin qui n'est pas de facilité : la voie est encombrée par les soucis, les retours sur soi, les amertumes et les souvenirs douloureux.
Comment guérir de ces blessures psychiques mal cicatrisées, comment assouplir ces défenses construites plus ou moins consciemment qui encombrent l'accès à la présence ? Tout dépend, explique l'auteur, de notre capacité à demeurer dans la contemplation au long de la traversée. Pour bien « méditer », c'est-à-dire s'exercer à persévérer dans le recueillement au-delà des réflexions et des images, il suffit de respecter deux conditions : être tourné vers Dieu et prêt à souffrir. La méditation silencieuse permet alors aux sentiments négatifs (culpabilités, ressentiments, irritations. ..) de remonter à la surface et d'être présentés à Dieu.
Seul ce qui est enduré avec amour, en relation avec notre moi profond et avec Dieu, est guéri. L'attention prolongée et confiante en la toute-puissance de l'amour qui vient d'en haut libère et purifie plus que tout autre chose Une psychothérapie peut s'avérer utile pour rendre plus conscient, mais la vraie libération est l'œuvre de Dieu.
Une telle démarche, au-delà de la guérison, vise l'union à Dieu, ou contemplation, cherchée d'abord dans la « méditation » et prolongée dans la vie. Empruntant à la tradition orientale de la « prière de Jésus » et à l'occidentale de l'« oraison de recueillement », elle vise une simplification, une unification intérieure de tout l'être dans sa relation à Dieu. Mais au lieu de partir des considérations de l'intelligence sur les vérités de la foi, elle invite d'emblée au silence de la raison et à l'attention au moment présent. C'est dire que le chemin ici proposé ne convient pas aux « commençants », mais bien à ceux qui, ayant acquis déjà une certaine familiarité avec l'Ecriture et une connaissance intérieure du Christ se trouvent lassés de considérations trop réflexives et appelés à une prière plus unitive, plus profonde. La simplicité, ici comme ailleurs, n'est pas au début mais au terme : prière cordiale de simple présence où l'on se dispose à accueillir plutôt qu'à conquérir, et à se laisser faire plutôt qu'à maîtriser, par un discernement plus affiné des pensées et des sentiments qui surgissent au coeur du silence intérieur.
L'originalité du parcours réside dans les dialogues avec les participants, à la manière d'un accompagnement qui permet au lecteur de se reconnaître et de trouver à chaque étape du parcours l'attitude juste d'éviter les dérives et de progresser dans l'attention active à la Réalité qui le porte le Christ Jésus qui invite à « demeurer » en lui.
Le P. Jalics a déjà animé plusieurs centaines de sessions. Son livre qui a suscité un vif intérêt et qui ne manquera pas de provoquer la réflexion, sinon la discussion, connaît sa septième édition allemande et a, depuis, été traduit en six langues.