Dans les périodes de gros temps spirituel, quand la violence des vents agite les esprits et bouleverse les repères intérieurs, saint Ignace suggère, parmi bien d'autres, une règle de discernement précieuse (Exercices spirituels, 335), elle joue sur deux images : « comme une goutte d'eau qui entre dans une éponge », le bon esprit nous touche avec douceur, légèreté, suavité. Tandis que le « mauvais nous touche de façon aiguë, avec bruit et agitation, comme lorsque la goutte d'eau tombe sur la pierre ».
Ce n'est pas sans rappeler l'épisode de la vie d'Élie poursuivi par la haine du roi Achab qui veut sa mort (1 Rois 19,1-18). Pour lui échapper, Élie ne peut plus compter que sur Dieu, mais il ne le reconnaît ni dans le fracas du tonnerre, ni dans le tremblement de terre. C'est dans la caresse « d'une brise légère » et le murmure apaisant « d'un fin silence » que parle le Dieu de paix.
Aujourd'hui, il en est de même pour nous dans nos questions éthiques. D'où nous viennent les jugements et opinions qui nous tiennent à cœur ? Et que produisent-ils en nous et chez autrui ? Leur valeur, indéniable, ne suffit pourtant pas toujours à justifier de prendre les armes pour les défendre. Certes, nous avons des points aveugles, certaines situations appellent un consensus et d'autres un compromis, mais nos émotions révèlent aussi des attachements réels parfois très légitimes mais pas toujours purs. Comme l'eau sur la pierre, le déchaînement médiatique fait du bruit et provoque de l'agitation, or nous ne pouvons pas croire que l'Esprit agisse par la violence. L'image de la goutte d'eau qui pénètre doucement l'éponge, ou qui tombe avec bruit sur la pierre, est un indicateur : sommes-nous en train de céder aux passions ou restons-nous à l'écoute du « fin silence » de l'Esprit saint ?