La vie de Chiara Lubich 1 se confond avec le Mouvement des Focolari — ou « œuvre de Marie » — qu'elle a fondé il y a juste soixante ans. Paradoxalement assez peu connu en France, le Mouvement des Focolari est sans doute un des mouvements les plus originaux et prometteurs nés dans l'Église du XXe siècle. Pour le comprendre, nous commencerons par souligner trois traits spécifiques, et particulièrement étonnants, du Mouvement des Focolari. Puis, après avoir exposé la spiritualité et la vie de Chiara Lubich, nous essaierons de pointer quels défis attendent encore la fondatrice et son Mouvement.


Les paradoxes du Mouvement


D'un côté, avec plus de 80000 membres répartis en plus de 182 pays, les Focolari sont clairement un « mouvement de masse ». Surtout si l'on tient compte des divers rassemblements (Mariapolis) ou de la pratique de la « Parole de vie » (un extrait de l'Écriture, le plus souvent du Nouveau Testament, commenté et vécu pendant un mois) qui touche près d'un million de personnes dans le monde. D'un autre côté, les Focolari mènent une vie communautaire exigeante. Le Focolare, qui est un peu l'âme du Mouvement, réunit, par communautés de trois à huit personnes, des célibataires — auxquels s'agrègent des personnes mariées — faisant les trois vœux de tout engagement religieux. Faire tenir ensemble mouvement de masse et radicalisme évangélique est le premier paradoxe du Mouvement des Focolari. Autre originalité : le Mouvement est statutairement présidé par une femme. Aujourd'hui, la fondatrice tient les rênes de cette œuvre à la fois classique et profondément nouvelle, et ce sera demain une autre femme qui sera élue pour lui succéder. Dans une Église dont la hiérarchie est encore largement masculine, le fait est à noter. Il y a plus : dans ce Mouvement où les formes d'engagement sont multiples, on trouve aussi bien des prêtres, des religieux et des religieuses de toutes congrégations qu'un certain nombre d'évêques. Le deuxième paradoxe réside autant