La paternité se trouve aujourd'hui confrontée au paradoxe suivant : la génération où la plupart des pères manifestent un souci marqué de présence à la croissance de leurs enfants est aussi celle où la figure du père est devenue incertaine. Rarement le sens de la paternité, de ce qui la caractérise en propre par rapport à d'autres liens a-t-il été aussi flou. Mais le paradoxe n'est peut-être qu'apparent : dès lors que les pères s'engagent davantage dans la vie quotidienne, leurs tâches et leurs rôles tendent à ressembler à ceux de la mère. Si, par hypothèse, la figure classique du père impliquait une certaine distance, nous aurions là une des clés de l'estompement de la différence entre paternité et maternité, sur le fond de tableau plus général des doutes quant à la portée de la différence entre hommes et femmes. D'autres facteurs interviennent dans cette incertitude, car le lien paternel est indissociable d'autres liens : lien conjugal, lien social, lien religieux. Or, à l'évidence, ces derniers sont eux-mêmes devenus précaires. Le sens de la paternité serait-il alors englouti dans les sables mouvants de la culture libérale ?
Les transformations ne doivent pas devenir fascinantes au point de faire oublier que la paternité est, par définition, ce qui se transmet de génération en génération. Transgénérationnelle, elle comporte une irréductible part de continuité. Il serait vain de prétendre réinventer la paternité à chaque génération. En deçà des discours tenus sur elle, la figure paternelle habite la mémoire, structure le désir, émerge des histoires personnelles. Une attention à son apparaître permet de discerner quelques traits qui, sans être intemporels, n'indiquent pas moins un irréductible. La paternité se dit dans la manière dont un père porte son enfant sur son épaule, dont il tient sa petite main dans la sienne, au timbre de sa voix. J'ai demandé à une quarantaine de personnes, de trois générations différentes, de m'indiquer quelle image de leur père venait spontanément à leur mémoire lors de son évocation « dans l'exercice de ses fonctions », autrement dit en tant que père, dans l'exercice de sa paternité comme telle. Et cela, dans la mesure du possible, avant toute analyse, tout jugement. Il s'agit moins, alors, de décrire des mœurs que de recueillir, à travers un style, un sens : le sens de ce que « père » veut dire. Une certaine forme se dessine alors à travers trois autres figures, celles du tuteur, du passeur, du témoin 1.
Tuteur de la croissance
D'emblée, le père est une stature. La verticalité, l'acte de se tenir droit en est un des signes élémentaires. Avoir une colonne vertébrale, se dresser, telles les sculptures de Giacometti, sous le ciel et face à ce qui arrive, nous voici devant un trait caractéristique de la figure du père. Ce n'est sans doute pas par hasard si le geste rituel par lequel le paterfamilias romain reconnaissait et adoptait son fils consistait à saisir celui-ci à terre pour l'élever à bout de bras au-dessus de lui, geste que les pères d'aujourd'hui aiment effectuer par jeu. L'élever (avant de l'« élever »), c'est l'arracher au sol, le faire accéder à sa hauteur. C'est élargir l'horizon : de plus haut, on voit plus loin.
Il semble bien en effet que, lorsque le mot « père » résonne de toutes ses harmoniques, il implique une dimension de hauteur, de grandeur ou, du moins, d'introduction à quelque chose de grand. Il semble aussi qu'il soit en affinité avec le schème de l'espace, de l'étendue, de l'extériorité. Aux sources de notre culture, la figure d'Abraham, fondatrice de la paternité, est associée à l'image de la voûte céleste. « Il le conduisit dehors et dit : "Lève les yeux au ciel et dénombre les étoiles si tu peux les dénombrer. Telle sera ta postérité" » (Gn 15,5-6). Si la culture occidentale garde mémoire d'un certain Stabat mater, il y aurait place aussi pour un Stabat pater. Ce qui est l'expression ultime de la maternité dans une situation de détresse extrême serait plutôt une des expressions premières de la paternité dans les situations communes. Selon une formule suggestive de Guy Corneau, « manquer de père, c'est manquer de colonne vertébrale ». Cette image rejoint celle du tuteur, qui favorise la droiture, la rectitude. Il donne corps à une direction, qui consiste à être orienté vers le haut. Le père est un « plus grand » qui appelle à devenir plus grand. Le mouvement ascendant est arrachement au repos de l'horizontale, à l'immanence du chaud cocon.
Mais, pour cela, l'axe et la direction ne suffisent pas. L'orientation dont il s'agit n'aura lieu que si la stature est aussi la manifestation d'une certaine force, d'une énergie, si la verticalité est associée à une certaine solidité. Si l'enfant a le sentiment d'une force intérieure. D'une force non seulement physique mais morale, subjective ou, mieux, personnelle. Il serait instructif de se demander pourquoi les enfants aiment tellement être portés sur les épaules de leur père. N'est-ce pas parce qu'ainsi ils éprouvent sa force, en même temps que sa taille ?
La force authentique, comme « vertu », au sens premier du terme, qui est apparenté à celui de « virilité » 2, est une des premières choses que l'enfant attend de son père. Il compte aussi, évidemment, sur la force de sa mère, mais celle-ci sera éprouvée selon des modalités différentes. Retenons comme un trait significatif la manière dont l'enfant — et tout spécialement le garçon — prend plaisir à éprouver la force physique de son père. Il est un âge où les fils aiment « se battre » avec leur père, lutter avec lui, sur un mode ludique. Ils ont tout particulièrement du goût pour les parties de « bras de fer », dans lesquelles deux forces musculaires s'opposent tout en se révélant mutuellement. Mais ces combats, qu'ils soient ludiques ou non, ne sont pas une fin en soi. S'ils prennent place dans la construction personnelle de l'enfant, c'est comme moments, comme relais vers d'autres combats, initiation à d'autres luttes 3.
Apparaît ici un nouveau trait de la figure paternelle, celui d'initiateur aux combats de la vie. Cette fonction est ritualisée dans les sociétés traditionnelles où demeurent des rites d'initiation. Mis en œuvre par la communauté des pères, ceux-ci comportent le passage par diverses épreuves, non sans souffrances. Pour entrer dans le monde des adultes, celui qui était jusque-là un enfant doit traverser en vainqueur la douleur corporelle, la peur, l'angoisse. De tels rites manquent de nos jours, où ils sont remplacés par des substituts douteux 4. Toutefois, dans un contexte plus restreint et moins socialisé, les pères, aujourd'hui encore, entrent spontanément dans ce rôle, à travers le jeu par exemple. Une des fonctions intrinsèques de la paternité est bien d'apprendre à l'enfant que la vie est un combat. S'indique ici une corrélation entre la dilution du sens spécifique de la paternité et l'érosion du sens de la vie comme combat. Le modèle d'une vie indolore, dans un monde douillet, au sein d'une société maternante, va de pair avec la montée du modèle matriarcal repéré par plusieurs observateurs 5.
Il n'est pas d'existence qui ne rencontre l'adversité, des vents contraires, des forces plus grandes qu'elle. Père est celui qui « tient bon ». Il fait face, moins comme ces mères qui trouvent en elles une prodigieuse source d'énergie pour rester gardiennes de la vie au milieu des guerres, des deuils et des tribulations de l'histoire, que comme le capitaine qui garde le cap au milieu des vents contraires. Garder le cap : tenir une direction, ne pas être le jouet des circonstances, rester sujet. Tous les pères, certes, ne peuvent pas attester de réussites sociales ou professionnelles éclatantes, mais tous peuvent être témoins de ceci : ils ont « tenu ». Avec vingt ou trente ans d'avance, ils ont traversé le temps, les années, les décennies. Ils ont surmonté les désillusions, les découragements, les échecs, les deuils, les doutes de leur siècle, la tentation du nihilisme, et ils sont toujours debout. Ils recommencent chaque matin leur métier d'homme. « Père » est tout simplement celui qui précède sur le chemin de la vie, qui a traversé des combats que ses enfants n'ont pas encore connus. Voir et savoir que cet être avec qui il partage les plus humbles réalités de la vie quotidienne, dont il connaît bien les faiblesses, a eu la capacité d'assumer cette traversée est pour le fils ou la fille une source de confiance et de force considérable.
Passeur de vie
Dès la conception, le père a introduit de la différence. Aux sources intimes de la vie, il a apporté de l'information. Ce que son corps a fait par ses gamètes, sa présence et sa parole le confirment et le relaieront. Il est celui qui rend présent ce qui vient d'ailleurs. Aux côtés de la mère — ce qui veut dire aussi à côté d'elle —, il est à la fois proche et à distance. Extérieur à la dyade mère-enfant, il est non seulement le « tiers séparateur » souvent évoqué, mais celui qui ouvre à l'altérité. Un point commun entre la plupart des pères évoqués est d'être situés en des lieux ou des moments intermédiaires. Souvent, ils sont aux limites, aux frontières, introduisant à une réalité nouvelle. Quant aux postures et aux actes, voici ces pères racontant, lisant, montrant, faisant visiter, initiant, récitant, enseignant... Entre l'intime et le vaste monde, entre le connu et l'inconnu, entre le proche et le lointain, ils offrent un passage. « C'est en regardant mon père sous la lampe que j'ai rêvé aux ciels et aux lunes, plus loin que ma rue » 6, se rappelait Marc Chagall. Tout se passe comme s'il y avait une affinité entre paternité et monde extérieur ou, plus précisément, entre paternité et nouveauté. Le père ouvre au monde, amène à prendre des risques, à innover, à aller de l'avant, alors que la mère assure. « Le père tire, alors que la mère pousse » 7. L'observation des jeux entre pères et enfants le confirme : « Le père encourage plus et gratifie moins que ne le fait la mère. Il lance davantage de défis. Il se montre volontiers plus déstabilisateur et moins disposé à résoudre le problème à la place de l'enfant. Par là même, il oblige l'enfant à inventer, à trouver des solutions nouvelles, bref, à progresser» 8.
Récurrente est la figure de l'initiateur. Passeurs, les pères le sont en introduisant fils et filles à un ordre de réalité. Entre paternité et langage, il y a, dès l'origine, un lien spécifique : secret, le lien paternel est connu et nommé grâce à la parole. Or, il s'avère que les pères ont leur manière d'introduire au langage. Des études indiquent qu'ils se montrent « des partenaires langagiers plus difficiles », obligeant l'enfant à parler de telle sorte qu'il soit compris par des interlocuteurs autres que sa mère. Ils jouent le rôle de « ponts linguistiques », manifestant davantage la dimension conventionnelle du langage, c'est-à-dire sa dimension proprement culturelle 9. Entre paternité et introduction à la culture, il semble exister un lien étroit.
Mais la culture n'est pas une fin en soi. À travers celle-ci, la parole paternelle ouvre à l'histoire, à la fois comme un héritage reçu et comme une tâche à continuer. La parole paternelle est une parole de mémoire et d'appel. À cet égard, il pourrait être instructif de mettre en relation l'affaiblissement actuel de la figure paternelle et celui de la double référence au passé et à l'avenir dans la culture contemporaine. Plusieurs observateurs soulignent que cette dernière est une culture du présent, mais d'un « nu présent » 10, où les sujets sont arrachés au passé et incertains quant à l'avenir. Un temps fragmenté, où des acteurs amnésiques n'envisagent qu'un futur à court terme. Sur ce fond de tableau, la consolidation de la figure paternelle ne pourra advenir qu'en associant ces deux biens fondamentaux que sont la « mémoire vive » 11 d'une part, et le sens de la promesse d'autre part. Pour la traversée du temps, paternité rime avec fidélité.
Le père n'introduit pas seulement au monde, à la culture ou à l'histoire, mais à la vie au sens plénier, spirituelle. Il est, selon l'expression de Simone Pacot, « passeur de vie ». Cette transmission est parfois comparée au passage de témoin ou de flambeau. Mais le père ne communique pas seulement un objet, et il ne s'arrête pas au moment où il transmet. Il effectue lui-même la traversée, avec ses fils et ses filles. Il passe, lui aussi, sur l'autre rive. La figure de saint Christophe portant sur ses épaules un enfant qui se révèle finalement être le Christ, est une des images de la paternité qui me parlent le plus. L'enfant est de plus en plus lourd, le courant de plus en plus fort. Mais, au moment où il croit sombrer, il aborde sur l'autre rive. Passeur de vie, le père est aussi passeur de foi et d'espérance.
Témoin de plus grand que lui
Pour être un initiateur et un passeur, le père doit être lui-même un témoin. Témoin des combats de la vie, donc, mais, plus originellement, témoin de plus grand que lui. Selon Christian Bobin, « un père, c'est quelqu'un qui représente autre chose que lui-même, et qui croit en ce qu'il représente » 12. Son image même renvoie à plus élevé que lui. Il est un personnage, peu ou prou entouré d'une certaine aura mythique. Figure, il l'est en ce sens aussi : il « figure », il représente. Il a une dimension métaphorique, au sens premier du terme : « porter au-delà » 13.
Il ne s'agit pas seulement d'introduire à un monde éthéré ou merveilleux, qui pourrait relever de l'imaginaire. Ce qui est en jeu dans cette médiation est le fait que père soit réceptif à un réel qui le dépasse, qu'il trouve lui-même appui en dehors et en avant de lui. Qu'il soit porté par une croyance ou, mieux, par une foi. Que serait un père qui ne croirait en rien ? Pourrait-il être « père » au plein sens du terme ? Par la croyance, il adhère à des significations, à des valeurs, à une interprétation globale de la vie. Par la foi, il fait confiance, il se fie en une parole, en une promesse. Comme « nos pères dans la foi » selon l'Épître aux Hébreux, il avance « comme s'il voyait l'invisible » (11,27). Nous retrouvons ici intuitivement une donnée anthropologique universelle : « L'enquête ethnologique dans les sociétés traditionnelles rappelle que la fonction paternelle, comme toute fonction parentale, est soutenue par les croyances qui lui confèrent une altérité. La fonction paternelle n'existe donc pas seulement sous forme d'identités perceptibles dans la réalité, mais aussi à la limite de l'expérience humaine, là où se dressent les figures fondatrices de l'Autre. Pas de fonction paternelle sans articulation à un au-delà » 14.
Le père est médiateur de l'altérité : au minimum, celle de la loi ; au plus profond, celle de l'origine. La mère initie tous les jours aux règles de la vie. Il semble toutefois qu'elle sera mieux en mesure de le faire si elle peut s'appuyer sur une autre parole, une autre présence, celle du père. Étant, dès le commencement, en position de tiers, sa parole aura un autre style. Il semble que le père soit davantage « père », que la figure de la paternité prenne davantage corps en lui, lorsque la règle est formulée par lui non seulement comme traduction des nécessités de la vie pratique, mais comme expression d'une loi. La loi n'est pas seulement une convention. Elle renvoie à une référence antérieure, à un principe, une altérité. C'est ainsi qu'elle fait autorité. Elle est une parole structurante, qui pose des limites et instaure des différences.
Elle est « loi » au plein sens du terme, incluant une dimension morale, si ces différences renvoient elles-mêmes à un ordre fondateur, à des alternatives fondamentales : « L'homme a besoin de rencontrer un témoin du combat qui a lieu en lui entre le mensonge et la vérité, entre la pulsion et le désir, entre la mort et la vie. S'il n'entre pas dans la vie à la lumière de ce discernement dont, classiquement, le père témoigne en édictant la loi, le petit d'homme ne sera jamais délivré de ses fantasmes » 15. Tous les termes de ce propos très dense de Denis Vasse seraient à peser un à un. Face à la menace du chaos ou de l'invasion par l'imaginaire, l'enfant a besoin de parents tous deux structurés par la loi comme parole qui structure, mais il se trouve que l'un des deux est tout particulièrement en position d'être témoin de cette loi comme telle.
Pas plus qu'il ne prétend être à l'origine de la loi qu'il énonce, le père en sa vérité ne prétend-il être à l'origine de la vie qu'il transmet. Ni le père ni la mère ne sont l'origine de leur enfant. Cela leur est déjà enseigné par le fait qu'ils sont deux, le recevant, en quelque sorte, l'un de l'autre. Mais, en vérité, ce n'est pas de l'autre qu'ils le reçoivent, ils le savent bien. D'où le reçoivent-ils alors ? D'une insaisissable origine, dans la mesure où, honnêtement, ils ne peuvent pas prétendre que l'acte sexuel, ni même la conception, puisse être qualifié de « cause adéquate » de l'enfant. La vie qui obscurément s'est frayée un chemin dans le ventre de la mère et qui, aujourd'hui encore, anime cet enfant les dépasse tellement... Elle déborde aussi bien les ressources de leur intelligence que leurs capacités d'agir. Denis Vasse encore indique combien sont graves les conséquences lorsque le père ou la mère se pose ou se conçoit comme l'origine de son enfant 16. Celui-ci ne peut plus se vivre comme sujet.
L'enfant grandit de sa vie propre qui n'est ni celle du père, ni celle de la mère. Reconnaître cela, c'est reconnaître une double altérité : celle de la personne de l'enfant et celle de son origine. À l'enfant comme tiers correspond la reconnaissance de l'origine comme Tierce, comme Autre, comme mystère. S'ils reçoivent dans la foi une Écriture qui la révèle comme telle, ils reconnaîtront cette origine comme Sujet. Avec cet Autre, l'homme et la femme, en assumant la responsabilité de parents, ont scellé, consciemment ou non, un pacte. Se reconnaissant comme « pro-créateurs », c'est-à-dire devant, en avant, entre le Créateur et l'enfant, ils sont conscients que cette place est unique et qu'ils sont assignés en ce lieu à une responsabilité sans équivalent. À chacun des actes qu'ils poseront pour protéger et aider à grandir cette vie, ils se situeront pratiquement comme les alliés du Créateur, dont ils savent (ou croient) obscurément que c'est lui qui fait grandir leur enfant. Il y a « pacte » dans la mesure où il y a réponse à un don antérieur et engagement à donner à son tour. Le don antérieur est double : celui de la vie qu'ils ont eux-mêmes reçue et celui de la vie de leur enfant. La seconde prend le relais de la première. Dans le contexte d'une foi et d'une Écriture où l'origine est reconnue comme « Père », cette alliance prend la forme plus spécifique d'une « alliance entre pères ».
Le sens de la paternité, finalement, ne peut pas être appréhendé de façon purement descriptive. La paternité est essentiellement éthique, spirituelle, tout en demeurant foncièrement incarnée. Elle réalise d'une manière qui lui est propre l'union du verbe et de la chair. Elle engage des vertus comme l'espérance, l'humilité, la persévérance ; elle ne peut se vivre sans pardon et sans fidélité. Comme toute authentique aventure spirituelle, elle a une dimension pascale. Il y a un mystère de mort et de résurrection au cœur de la paternité. N'oublions pas que, dans la langue biblique, « passage » se dit Pâque. Donner ce que l'on ne possède pas, la vie plus grande que soi par laquelle on est traversé ne va pas sans mille morts à ce que l'on croit posséder. Tout père pourrait dire devant son enfant la parole du Précurseur : « Il faut que lui grandisse et que moi je décroisse » (Jn 3,30).
1. J'ai recueilli ces témoignages et j'en propose une analyse plus détaillée dans mon livre Passeurs de vie Essai sur la paternité.
2. En latin, vis, vins force, vigueur On peut entendre la vertu comme force de la volonté.
3. La petite fille attendra d'une autre manière de son père qu'il la conforte dans son identité Par une certaine forme de tendresse et de reconnaissance de sa féminité notamment (op. cit., chap 2).
4. Conduites à risques, bizutages, violence et transgressions diverses.
5. Voir Michel Schneider, Big mother, Odile Jacob, 2002.
6. Cité par Eloi Lederc dans Chagall, un vitrail pour la paix, Marne, 2001, p 12.
7. Témoignage d'une mère recueilli par Jacques Arènes, dans Y a-t-il un père dans la maison ?, Fleurus, 1997, p 98.
8. Jean Le Camus, « L'invention du paternage », Nouvel Observateur, décembre 2002, p 26.
9. Ils ont tendance à utiliser un vocabulaire plus technique que celui de la mère, ils expriment davantage de demandes de reformulation Voir J Le Camus, Le père, éducateur du jeune enfant, PUF, 1999.
10. Titre d'un article éclairant de Françoise Le Corre dans Etudes, n° 3984, avril 2003.
11. Expression de Paul Ricoeur dans Temps et récit, Seuil, 1984.
12. Christian Bobin, Le très bas, Gallimard, 1992, p 22.
13. Selon le grec meta-pherevn.
14. Charles-Henry Pradelles de Latour, « Pères, qui êtes sous d'autres cieux », Nouvel Observateur, p 18 Du même auteur. Incroyance et paternité, EPEL, 2001.
15 Denis Vasse, La vie et les vivants, Seuil, 2001, p 34.
16. Voir, notamment, L'ombilic et la voix, Seuil, 1974 17. Paul Claudel, Cinq grandes odes, III, OEuvre poétique, Gallimard, 1957, p 257.
18. Philippe Soual, « Visages du Père », Théophihon, V-2, juin 2000, p 355.