Daniel Marguerat, bibliste renommé et spécialiste de l'approche narrative des récits bibliques, ne néglige pas pour autant la recherche historique car, pour son livre sur Jésus, il s'appuie sur les dernières avancées dans ce domaine. Pour lui, l'étude historique, antidote du fondamentalisme, impose le deuil d'un Jésus imaginaire et permet d'avancer vers « des réponses non envisagées ou non souhaitées » afin de nourrir notre foi.

L'ouvrage est divisé en trois parties. La première s'occupe des sources, de la naissance de Jésus et de son lien avec Jean Baptiste. Sa description de Jésus « contrôlée par l'analyse des sources » ne s'appuie pas seulement sur les textes chrétiens car l'exégète utilise des sources extracanoniques, comme les évangiles apocryphes et les écrits des historiens juifs anciens. En outre, il reprend les études faites grâce aux nouvelles recherches en archéologie et aborde de nouvelles questions avec les travaux sur le judaïsme ancien. S'appuyant sur les travaux de Bruce Chilton qui reprend la tradition juive ancienne, il propose de voir en Jésus un mamzer (« bâtard »), un enfant sans père et donc illégitime au regard de la Torah. Pour Marguerat, ce statut de marginal expliquerait pourquoi Jésus s'est montré naturellement sensible à la situation des exclus de la société juive. La deuxième partie décrit les paroles et les actions de Jésus annonçant le Royaume. Jésus est décrit comme un guérisseur. S'il n'est pas le seul à cette époque à pratiquer guérisons et exorcismes, son originalité tient à ce que cette action thérapeutique est vécue comme le combat qu'il conduit contre les forces hostiles à Dieu, rendant ainsi proche son Royaume. Maître de sagesse et poète du Royaume, Jésus a-t-il eu conscience d'être le Messie ? S'il refuse ce titre, dit l'exégète, ce qui est décisif, c'est la conscience qu'a Jésus d'une exceptionnelle intimité avec Dieu dont il s'est voulu le témoin. Dans Matthieu 5 – 7, Jésus réinterprète la Loi. Il veut souligner l'urgence de la compassion et de l'amour inclusif. Jésus élève l'exigence de Lévitique 19,18 (« Tu aimeras ton prochain comme toi-même ») à la hauteur de l'amour dû à Dieu. Le compromis n'a plus de place. C'est cette sagesse propre qui est l'originalité de Jésus.

La troisième partie, « Jésus après Jésus », reprend ce que l'on peut dire de la résurrection du Christ. La suite est l'histoire de la foi, qui dit l'expérience de femmes et d'hommes d'avoir vu Jésus ressuscité. Marguerat suit encore la trace de Jésus dans le judaïsme et dans le Coran.

Ce livre intéressera des lecteurs très au fait des recherches comme ceux ne les connaissant pas. Il provoquera sans doute quelques étonnements devant ses prises de position assez suggestives.