Parution initiale dans Christus n° 147 (juillet 1990).

Il est allongé, immobile, en silence depuis dix minutes. Peut-être quinze. Avec lui, je me tais. Près de lui, je retiens mon souffle. Et quand, enfin, il prend la parole, c'est seulement pour dire : « C'est difficile de parler. » Un moment de silence encore, et puis : « C'est difficile de parler vrai. » Plus tard, il associera avec toutes les paroles fausses que l'on prononce, tous ces mots qui ne sont pas ceux que l'on voudrait dire. Mais lui, où trouvera-t-il les mots pour dire ce qui en lui se balbutie à peine, ce qui cherche à émerger de l'informe, ce qui n'a ni visage ni grammaire, boue épaisse, forêt vierge encore, qui attendent la structure et les chemins tracés ? Quand une forme adviendra, même incertaine, elle sera le signe qu'il commence de se saisir de lui-même. Elle en sera aussi le moyen. Alors peut-être les mots surgiront-ils. Et le verbe imposant sa loi, un sens émergera. Quelque chose de lui se précisera dans l'ascèse du mot juste trouvé et accepté.

Des mots pour cacher ou des mots pour dire ?

Ne serait-ce pas le même mouvement qui