Dans une conversation entre Coubert et sa femme à propos de solutions administratives expérimentées à de multiples reprises dans les grandes villes, Ionesco fait dire à Madeleine : « Il n'y a rien de nouveau sous le soleil. » Plus tard dans la conversation, laquelle a bifurqué sur la question de savoir si l'on peut faire du nouveau en théâtre, Madeleine ripostera encore : « Je te répète que rien n'est nouveau sous le soleil. Même quand il n'y a pas de soleil1. »
La première de ces répliques est une citation de Qohélet dont elle semble reprendre le sens premier, comme il ressort de l'entier verset du texte biblique : « Ce qui a été, c'est ce qui sera ; ce qui s'est fait, c'est ce qui se refera ; rien de nouveau sous le soleil » (Qo 1, 9). La seconde en est une reprise ludique, en une sorte de mise en abyme. Car non seulement Madeleine redit ce qu'elle a déjà dit mais elle dit encore ce qu'elle fait, à savoir répéter. Elle élève ainsi au niveau langagier ce qu'elle énonce du réel : il n'est jamais rien de nouveau, tout n'est que répétition. Son propos, toutefois, s'écarte de la simple reprise et tourne à l'absurde lorsqu'elle ajoute : « Même quand il n'y a pas de soleil. » L'incongruité de la formule est, au demeurant, appuyée par le silence qui doit suivre dans l'exécution de la pièce, selon ce qu'indique une didascalie. Le verset biblique ainsi déformé se fait expression burlesque du sentiment de l'absurde : tout, sans cesse, se répète. Il ne reste qu'à se taire.
Est-ce vraiment là, cependant, où veut nous conduire Qohélet ? Ce maître de sagesse, pourtant confronté à d'importants changements sociaux et culturels2, n'aurait-il d'autre leçon à nous livrer qu'une invitation à la résignation face