Il faut faire l’apologie de l’imagination. Il faut faire l’apologie du rêve. Mais de quel rêve ? Celui du sommeil ? C’est bien dans leurs rêves que plus d’une fois le Dieu de la Bible s’adresse aux hommes. Et il y a des rêves qui nous laissent tels « qu’il nous faudra vivre maintenant pour de longs jours comme dans une chambre familière dont la porte battrait inopinément sur une grotte » 1. Car il y a une réalité du rêve dont je ne connais pas d’exemple plus saisissant qu’au détour d’un amour de Swann, une affirmation singulière : Swann pensait qu’il ne reverrait jamais Odette. « Il se trompait. Il devait la revoir une fois encore, quelques semaines plus tard. Ce fut en dormant, dans le crépuscule d’un rêve » 2.
 

Du rêve à la rêverie


Ou bien au contraire s’agit-il du rêve éveillé, de la rêverie bache­lardienne qui est si proche de la méditation ? « On devrait alors accumuler les documents sur la conscience rêveuse » 3. Et l’on se prend à rêver : que fait donc Descartes d’une méditation à l’autre ? Car enfin, six méditations, cela signifie clairement une semaine consacrée à régler, une fois pour toutes, les fondements de la cer­titude ; et par conséquent, une méditation par jour, la plume à la main. Mais entre-temps ? Descartes s’incorpore ce qu’il n’a encore compris qu’intellectuellement ; aussi, le soir venu, « il sera bon que je m’arrête un peu en cet endroit, afin que, par la longueur de ma méditation, j’imprime plus profondément en ma mémoire cette nouvelle connaissance » 4. Une méditation sans écriture, une rêverie ; un temps où c’est la vérité qui prend l’initiative