Marie-Hélène Boucand, médecin, philosophe, atteinte d'une maladie rare, Lyon.

Si la question du respect se pose face à la personne handicapée, c'est probablement parce qu'en l'occurrence, le respect ne va pas de soi. Le respect étant posé comme fondateur de la relation à autrui, pourquoi est-il opportun de se questionner sur ce principe face à l'autre, porteur d'un handicap ? Pour tenter une approche plus parlante, nous évoquerons les conditions du respect face à une personne porteuse d'un très lourd handicap mental, moteur ou de communication. De façon paradigmatique, je propose aussi de nous situer dans le cadre d'une relation de soin, qui a été le lieu de mon expérience auprès de personnes cérébrolésées.

La pitié et le rejet

Les positions habituellement évoquées dans le face-à-face avec une personne handicapée oscillent entre la pitié et l'ignorance. Arrêtons-nous sur chacune d'entre elles :

La pitié est ce sentiment – si mal vécu par les personnes qui l'inspirent – réduisant la personne handicapée à la souffrance, aux difficultés qui apparaissent immédiatement au regard que l'autre pose sur elle. Cette commisération est parfois emprunte de mépris : « Le pauvre, vous avez vu dans quel état il est !…. » Nous sommes ici dans le jugement de valeur et d'exclusion : cet état ne doit pas exister, cette existence, cette vie, ne vaut pas la peine d'être vécue. C'est l'existence même de l'autre qui est niée. Je ne peux supporter de voir que l'autre, ainsi défiguré, soit assimilé à mon semblable. « L'autre ne me regarde pas, ne me concerne pas », parce qu'il n'est pas identique à moi-même ou