Depuis trente ans que je porte en moi l'existence de l'islam comme une question lancinante, j'ai une immense curiosité pour la place qu'il tient dans le dessein mystérieux de Dieu. […] En laissant cette question me hanter […], j'évite de figer l'autre dans l'idée que je m'en fais, que mon Église peut-être m'en a transmise, ni même dans ce qu'il peut dire de lui actuellement, majoritairement.1
Nous ne savons pas lire – pas nous lire les uns les autres. « Qui peut se flatter qu'il lira juste ? », demande Simone Weil2 qui donne ici au mot « lecture » le sens d'évaluation de l'autre, d'interprétation affective de son comportement ou de son apparence, de jugement de valeur porté sur autrui. Personne, ou presque, ne sait lire autrui (et bien souvent soi-même) avec justesse, donc avec justice.
De l'ombre à la pleine lumière
La présence des musulmans en France est très ancienne, mais pendant longtemps, trop longtemps, on ne l'a guère remarquée. Ces gens « autres » demeuraient à la limite du