Paru dans Christus n° 41, janvier 1964.

Est-il besoin aujourd'hui de mettre en garde contre la fausse paix ? Nombreux sont, en effet, les chrétiens qui ont pris au sérieux les conflits agitant le monde et qui, loin de chercher dans leur religion un abri assuré, ont ressenti, plus fortement que d'autres, les appels venus des quatre points de l'univers. Ils ont largement ouvert leurs portes et, assaillis par de multiples angoisses, ils risquent plutôt de compromettre la sérénité requise par l'action. Au lieu de les questionner sans cesse, au lieu de chercher à les inquiéter, alors qu'ils le sont déjà souvent trop et mal, n'est-il pas préférable de leur venir en aide, dans la mesure du possible, pour qu'ils retrouvent les chemins de la paix véritable ? En procédant ainsi, on ne les invite guère à s'arrêter et à s'assoupir, car la paix promise à ceux qui accueillent le royaume de Dieu et qui se donnent, corps et âme, à son service est d'une telle exigence qu'ils pourraient bien en avoir peur et souhaiter revenir à leur trouble passé, lequel est encore à mesure humaine.

Prenant appui sur la doctrine spirituelle de saint Ignace, fidèle au message évangélique le plus traditionnel, nous voudrions préciser quelles sont, pour le chrétien, les principales sources de la paix. Elles nous semblent au nombre de trois : la soumission à Dieu qui ordonne nos existences selon ses desseins, la pauvreté qui nous conduit à nous appuyer sur Dieu seul, la charité qui suppose la paix intérieure mais qui la réalise en même temps parmi les hommes et la fait croître en nous.

La soumission à Dieu

Pour encourager à faire les Exercices, dont le but unique est la découverte de la volonté actuelle de Dieu, il suffit, pense saint Ignace, de rappeler que beaucoup les ont commencés « dans la contrariété et la désolation pour les achever dans la consolation » ou encore de souligner « que la paix demeure dans l'âme de ceux qui les font bien1 ». Si le trouble est dans nos cœurs, si l'angoisse nous étreint, c'est à coup sûr parce que nous ne sommes pas adaptés aujourd'hui à ce que Dieu désire pour nous. Cela ne veut pas dire fatalement que nous soyons en état de péché, puisque la Vierge elle-même a connu la détresse, cela veut dire qu'un appel de Dieu retentit, auquel nous n'avons pas encore consciemment et volontairement répondu en y conformant tout notre être.

Puisque Dieu est vraiment le Seigneur de l'univers et de chaque homme en particulier, il est facile de comprendre que la paix, fruit de l'harmonie, de l'ordre et de la réconciliation, apparaît uniquement dans la mesure où notre être correspond à la puissance créatrice et salvifique de Dieu qui harmonise, ordonne et réconcilie. Celui qui sort de Dieu ou qui ne s'adapte pas encore à lui, abandonne par là même les forces susceptibles de vivifier sa personne, d'en rassembler les éléments épars, de les coordonner et de les reposer en les unifiant. L'inquiétude naît toujours de la division ; et l'origine de toutes les divisions n'est autre que l'éloignement du Dieu unique et unifiant. Si donc, dans le concret de nos vies, dans