Prés. et éd. R. Heyer.
Presses Universitaires de Strasbourg, 2005, 240 p., 18 euros.


Il s’agit de la publication posthume d’une étude consacrée, en 1971, à Monsieur Tronson, figure tutélaire de Saint- Sulpice et donc, dans une large mesure, de la spiritualité sacerdotale en France et au-delà.
Pendant plus de deux siècles, dans tous les séminaires sulpiciens du monde, on se réunissait à la chapelle avant le repas de midi pour écouter le supérieur lire l’un des deux cents « examens » publiés par M. Tronson en 1690.
La lecture ménageait des pauses destinées à permettre à chacun de s’interroger sur la manière dont il avait, ou non, combattu le défaut ou cultivé la vertu qui étaient à l’ordre du jour. La minutie des interrogatoires, gage du succès de la formule, fournit une ample moisson à qui veut se renseigner sur l’état des moeurs ecclésiastiques à la fin du Grand Siècle. Elle permet aussi de dessiner, au-delà des traits du « bon prêtre » de l’âge classique, et comme le suggère le sous-titre de l’ouvrage de Goichot, la figure du prêtre « classique », tel qu’on le rencontrait fréquemment encore au lendemain de la deuxième guerre mondiale, tel aussi que l’ont popularisé la littérature et le cinéma.
L’ouvrage fournit une étude transversale de ces examens. Il publie aussi les douze examens portant sur la « modestie ». La précision même de cette « éducation totalitaire », qui « ne néglige aucun moment de la journée, aucun niveau d’activité », suggère que, dans les séminaires de l’Ancien Régime, une sérieuse distance existait entre l’idéal sulpicien et la réalité.
Ce n’est qu’au XIXe siècle, estime Émile Goichot, que l’idéal se trouva réalisé, et ce « dans un monde différent de celui auquel il était destiné ». Cela explique sans doute la brutalité avec laquelle cet idéal-type s’est effondré au milieu du XXe siècle.