Le discernement des esprits
La vie d'Ignace, à la suite du Christ et avec Lui, a été tout entière sous la mouvance de l'Esprit. Tout au long de sa vie, il a pu vérifier que, pour trouver la paix dans son agir quotidien, c'est à la conduite de l'Esprit qu'il lui fallait se confier. C'est ainsi qu'il a réalisé pour le Royaume de Dieu une œuvre qu'il n'avait pas prévue et qui dépassait ce qu'il lui était possible d'imaginer.
C'est aussi sous cette mouvance que nous pouvons aborder le « discernement chez Ignace ». Rappelons qu'il ne faut pas confondre le Don et les dons. Le Don par excellence, c'est celui de l'Esprit saint et, parmi les dons, il y a celui du discernement des esprits.
Discerner, c'est pouvoir reconnaître distinctement, c'est-à-dire sortir du brouillard, ou encore percevoir avec acuité les enjeux d'une question. Puis peser, faire un tri par rapport à ce qui est essentiel, important ou urgent, et enfin décider. Il est possible, à ce moment-là, d'entendre, comme une brise légère, le Seigneur nous dire : « Fais un pas et je marcherai dedans. »
Paul l'avait rappelé à la petite communauté de Thessalonique. Il le redit dès le début de sa lettre aux Philippiens : « Voici ma prière : que votre amour abonde, encore et de plus en plus, en clairvoyance et en parfaite sensibilité pour discerner ce qui convient le mieux » (Ph 1,9-10). Cette prière rejoint le songe de Salomon à Gabaon où, à la question de Dieu : « Que dois-je te donner ? », Salomon rend d'abord grâce de son histoire et demande ensuite « un cœur qui écoute et capable de discerner pour gouverner son peuple » (1 R 3,9).
Cette capacité à discerner est un don reçu au baptême et nous avons à nous y exercer. Comment ? Selon une démarche qui peut se ponctuer à l'aide de trois verbes, apparaissant tous trois dans le titre même des règles de discernement du livret des Exercices spirituels d'Ignace : sentir, reconnaître et décider. Le texte est très précis : « Sentir et reconnaître en quelque manière les différentes motions… Les bonnes pour les recevoir et les mauvaises pour les rejeter » (Ex. sp., 313).
Cette capacité à « sentir », nous avons à nous y exercer. Bien des personnes, en effet, croient qu'elles sont en « désolation » lorsqu'elles n'éprouvent extérieurement rien de très sensible, ou croient au contraire qu'elles sont en « consolation » lorsqu'elles éprouvent des enthousiasmes à fleur de peau. Au-delà des impressions superficielles, il faut descendre au lieu