Il est désormais acquis que le travail scientifique s’élabore selon un « athéisme méthodologique ». La formule, un brin provocatrice, exprime ce que le Concile Vatican II appelle la légitime « autonomie des réalités terrestres » 1. Le chercheur est libre de bâtir des scénarios explicatifs sans faire nécessairement appel à une instance « surnaturelle » qui interviendrait à titre de cause particulière venant compléter la série des causes « naturelles ». Ceci est à comprendre non pas comme une tolérance qui prend acte de la sécularisation moderne et renonce à la mettre en question, mais comme la conséquence d’une théologie de la création bien comprise. L’acte créateur consiste à conférer aux créatures « leur consistance, leur vérité et leur excellence propre ». Elles acquièrent, selon leurs « espèces », la capacité de se mouvoir par elles-mêmes, une certaine autonomie à l’égard de leur environnement, qui, chez l’homme, prendra la figure de la liberté. De ce fait, la démarche intellectuelle de connaissance est d’un autre ordre que la démarche personnelle de foi qui engage une liberté 2.
Cela explique que, depuis les premiers temps de la science moderne, au début du XVIIe siècle, l’attitude des savants à l’égard de la religion ait été très diversifiée. Il y a ceux qui séparent délibérément le travail scientifique de la quête de sens, soit qu’ils écartent la seconde comme dépourvue d’intérêt, soit qu’ils considèrent que les deux sont sans rapport. Toutefois, ces attitudes, qui vont de l’indifférence à la démarcation prudente, sont moins fréquentes aujourd’hui qu’elles ne l’étaient dans un passé récent. Les avancées des sciences, en particulier dans le domaine du vivant, amènent à s’interroger sur la destinée humaine, le « propre de l’homme ». Toutes questions qu’un positivisme avait résolument écartées comme dépourvues de pertinence pour la seule entreprise qui vaille : la recherche de la