Christus : Qu'évoque pour vous cette question d'une spiritualité au féminin ?

Véronique Margron : On se pose la question d'une spiritualité au féminin. Pourquoi donc ? Se pose-t-on celle d'une spiritualité au masculin ? Toute spiritualité est bien évidemment portée par une chair. Cette chair étant celle d'un homme ou d'une femme, elle est toujours sexuée. De ce point de vue là, on peut affirmer que la spiritualité est marquée par l'être féminin ou l'être masculin, mais tout comme elle est marquée par la culture, par l'époque, par la tradition. Voici peut-être la première question qu'il faudrait se poser, et à laquelle il n'y a pas de réponse simple : comment tout ce qui nous constitue (sexe, temps, espace…) marque-t-il notre spiritualité ? Quoi qu'il en soit, évoquer la question d'une spiritualité au féminin veut-il donc dire que la singularité de l'expérience féminine n'est pas encore tout à fait acquise, quand il s'agit de vie, de tradition et de filiation spirituelles, alors que les grandes figures spirituelles féminines sont innombrables ?

Une autre question serait nécessaire : faut-il parler d'une spiritualité au féminin, ou d'une spiritualité portée par des femmes ? Car qui pourrait dire un substrat féminin, hors de l'expérience historique et éminemment plurielle des femmes.

Répondre de la chair

Christus : Dans de nombreux lieux d'Église, il n'est pas encore évident qu'une femme (même religieuse) soit considérée comme apte à accompagner : c'est le travail des prêtres !

V. M . : Je me souviens que, pour accompagner un groupe lié à un mouvement d'Église, il m'avait quasiment fallu passer un examen auprès des responsables. Est-ce que c'était parce que j'étais une femme, une sœur ou une théologienne ? Je ne sais si les mêmes questions étaient posées à un prêtre… En même temps, nous sommes très nombreuses à accompagner des personnes. La confiance faite aux femmes dans notre Église n'est pas encore tout à fait acquise partout. Mais il ne faut pas oublier que cette