Les lumières jetées par la psychologie contemporaine sur les déterminismes qui nous meuvent, souvent à notre insu, ne sont pas sans inquiéter en chacun de nous l'honnête chrétien qui n'a pas cessé d'entendre la parole de saint Paul : « C'est la volonté de Dieu que vous vous sanctifiiez. » Notre rapport avec Dieu dépend-il vraiment de structures psychiques qui sont en nous sans être de nous ? Nous sommes prêts à admettre qu'elles ne nous contraignent pas, et que l'Eïmarménê – l'antique Destin –, pour avoir quitté les astres et s'être logé dans notre intérieur, reste bien tel que le décrivait saint Thomas d'Aquin : celui qui incline, mais ne nécessite pas. Il n'en reste pas moins qu'il pèse sur nous d'un poids plus ou moins lourd.
Il y a les psychismes disgraciés, pauvres en dispositions naturelles pour une vie conforme à la loi morale : ils font les êtres qui ne seront jamais pleinement vertueux et se traîneront de faiblesse en faiblesse jusqu'à la fin de leur vie ; il y a les psychismes secs et irréductiblement rationalisants, de ceux qui n'auront jamais aucun goût pour les sacrements et pour la simple soumission au mystère ; il y a les psychismes infantiles, hantés par un besoin de sécurité, obsédés par une fausse culpabilité, de tant d'anormaux grands ou petits, qui ne connaîtront vraisemblablement jamais la lucidité des jugements de valeur et la constance des vouloirs : tous ceux-là, et ils sont nombreux, sont-ils vraiment défavorisés par rapport à la sanctification ?
Les anciens hagiographes aimaient à décrire d'une façon naïve le naturel heureux