« Il vous précède en Galilée » (Mc 16, 7)

Suivre le Christ jusqu’au bout… Mais quand il meurt, quand le projet s’effondre et qu’avec lui se diluent les liens tissés ? Quand le temps de l’absence de Dieu se fait pesant et laisse la souffrance, la violence, le manque d’espérance nous excéder ?  Quand les pratiques vieillies s’amenuisent et que les institutions décalées tombent en ruine, qu’est-ce alors que suivre ?

Nous pouvons réagir en fermant les portes par peur, comme l’écrit D. Aleixandre, la pierre du tombeau étant trop  grande et lourde pour nous. Nous pouvons être tentés de  prolonger le samedi en nous réfugiant dans l’entre nous  d’une spiritualité sans consistance, ou de prendre des chemins d’Emmaüs qui fuient la violence, la mort et les combats. Nous baissons les bras devant un ordre du monde trop injuste, une violence trop enracinée, une foi trop incongrue…

Mais il y a le chemin alternatif du « premier jour de la semaine ». Chemin de ceux qui marchent dans l’obscurité de la nuit mais s’approchent des lieux de mort, justement pour arracher à celle-ci quelque chose de sa suprématie, pour l’empêcher de ronger et contaminer la vie. Comme ces femmes avec leur parfum voulaient effacer la mort du visage de Jésus. Seul l’amour, la compassion, donnent d’emprunter ce chemin avec foi malgré le poids des obstacles.

Et le miracle se produit. La lumière, la parole et la vie sont au rendez-vous. Le tombeau est vide mais il parle lumineusement : la vie n’est plus tenue là, enfermée par la mort désormais déchue de son pouvoir. Elle n’est plus derrière nous, dans les souvenirs de beaux jours hypothétiques et perdus. Elle nous précède, elle est en avant de nous. Dans cette Galilée ouverte à toutes les nations, les spiritualités, les cultures et les combats, le Fils de Dieu, vivant, nous appelle et nous rassemble pour s’offrir avec lui à toute rencontre. Avec lui et en lui, avec l’apôtre Pierre et le centurion Corneille, avec les innombrables témoins qui nous ont précédés, avec les saintes femmes qui ne cessent de donner le courage dans le parfum de la vie à venir, il nous faudra mourir à nous-mêmes. Quitter peut-être des formulations et des coutumes sans profit, pour renaître avec d’autres dans une intelligence, un langage, des pratiques toujours plus approfondis et universels de la foi. Le Christ ressuscité attend que nous lui donnions tout ce que nous sommes, toute notre chair, qui que nous soyons, pour qu’il en fasse sa présence de justice et de paix dès aujourd’hui dans notre monde.

Quelle part de moi-même, quelle compétence ou qualité puis-je mettre en œuvre pour être plus juste dans mes relations, dans les conflits que je vis, pour témoigner du Ressuscité et faire progresser la paix de son Royaume ?

« Il est vivant ».

Prions pour l’Eglise, pour les nouveaux baptisés, pour tous les acteurs de paix et de réconciliation.