Du refoulement

Christus : Quand on aborde la question de la mémoire dans le domaine psychanalytique, on le fait plutôt par son envers, par l’oubli, c’est-à-dire par le refoulement ou la censure. Freud a dit à un moment donné que le refoulement est la pierre d’angle de la psychanalyse. C’est donc sous l’aspect pathologique qu’il aborde les réminiscences (on pense à ses premiers écrits sur l’hystérie), et ce qui frappe, c’est qu’elles soient perçues sous un angle pénible dont il s’agit de se débarrasser. Comment jouent aujourd’hui ces souvenirs dont on ne connaît pas précisément l’origine ? Comment définiriez-vous le refoulement ?
Michèle Montrelay
: Le refoulement est la condition première de l’inconscient. Il en est constitutif. Et si l’on précise que l’inconscient tout autant que la conscience participe de notre humanité, de notre capacité de penser, de sentir et de désirer, aussi bien de notre identité, vous percevez d’emblée qu’il ne relève pas toujours, loin de là, de la pathologie. Mais, en effet, c’est par ce biais que Freud, en tant que médecin, s’est mis à compter avec lui, à serrer de plus en plus près ses formations, ses mécanismes, son économie. L’inconscient se découvre à lui comme une mémoire qui est là, qui se conserve en silence et se manifeste par une souffrance soit du corps, soit de l’esprit. Paradoxalement, l’inconscient en tant que mémoire a des points communs avec la mémoire informatique. Le disque dur de votre ordinateur stocke un ensemble d’informations numériques qui d’elles-mêmes ne disent rien. C’est l’informaticien, puis l’usager qui les transforment en programmes accessibles à la représentation.
De même, à l’orée de la vie, des sensations, des affects se gravent à même le corps : pas tous les affects, pas