Préf. R. Panikkar. Trad. M.-C. Desaubliaux. Cerf, coll. « L’histoire à vif », 2007, 428 p., 39 euros.
Avec Jules Monchanin, Henri Le Saux (1910-1973) apparaît aujourd’hui comme l’un des grands pionniers du dialogue entre le christianisme et l’hindouisme. Mais loin d’être une confrontation purement intellectuelle ou un dialogue d’experts, ce dialogue a correspondu surtout dans sa vie à une profonde expérience spirituelle, à une immersion totale dans l’univers de l’hindouisme. Non sans d’ailleurs un sentiment douloureux de déchirement avec le christianisme de ses origines, ni une difficulté à traduire de manière claire cet écartèlement.
« Au-delà, toujours au-delà ! Ce ne sont pas vos présents que je désire Seigneur, mais vous-même. » Ce mouvement qui pousse Le Saux toujours vers l’ailleurs se retrouve dans la biographie spirituelle et très admirative que lui consacre ici Shirley du Boulay. Collant au plus près de son itinéraire, elle suit le moine bénédictin breton de l’abbaye de Kergonan, qui répond à l’appel du P. Monchanin en Inde et fonde avec lui l’asrham de Shantivanam, dans les méandres de sa quête d’absolu. Une vocation irrésistible, comme l’indique plus d’une page de son Journal : « Notre oeuvre ne peut réussir qu’à condition de se faire indien jusqu’au bout, depuis le plus profond de l’âme et du coeur jusqu’aux plus infimes détails de vie. » Vocation qui le conduit à la montagne d’Arunachala, où le marquent la rencontre de Ramana Marharshi et l’appel au dénuement total. Plus tard, ce sera la rencontre et l’influence du spirituel tamoul Gnanananda.
Nous le suivons ensuite dans sa vie errante, marquée par le passage dans les différents monastères et la participation au dialogue interreligieux. À certains moments, pourtant, il est difficile de savoir où se situe vraiment le P. Le Saux, qui pousse jusqu’à l’extrême sa plongée dans la mystique hindouiste. Comment articuler cette sorte de dilution avec le sens du Christ ou de la Trinité, par exemple ? Regardée au départ avec suspicion, son expérience va être peu à peu perçue avec sympathie dans le monde catholique et le rapprocher de personnalités comme Bedde Griffiths ou Raimon Panikkar. Tout en se libérant de nombreuses formes extérieures, en particulier dans le domaine liturgique, le P. Le Saux tient à concilier jusqu’au bout l’expérience de Jésus et la non-dualité chère à l’hindouisme, selon ses propres mots : « Ce “Je suis” brûlant, dévastateur, non plus même “Dieu est”, car qui est pour oser parler de Dieu ? Ceci est la grande grâce de l’Inde, qui fait découvrir le “Je suis” au sein de l’Évangile (Jean 8). »
Cette plongée dans la Grotte du coeur fascinera ceux qui s’intéressent aux mystiques d’Asie et à leur relation possible au christianisme. On regrettera cependant que l’auteur ne pousse pas davantage un questionnement critique ou interrogatif sur le personnage.
Avec Jules Monchanin, Henri Le Saux (1910-1973) apparaît aujourd’hui comme l’un des grands pionniers du dialogue entre le christianisme et l’hindouisme. Mais loin d’être une confrontation purement intellectuelle ou un dialogue d’experts, ce dialogue a correspondu surtout dans sa vie à une profonde expérience spirituelle, à une immersion totale dans l’univers de l’hindouisme. Non sans d’ailleurs un sentiment douloureux de déchirement avec le christianisme de ses origines, ni une difficulté à traduire de manière claire cet écartèlement.
« Au-delà, toujours au-delà ! Ce ne sont pas vos présents que je désire Seigneur, mais vous-même. » Ce mouvement qui pousse Le Saux toujours vers l’ailleurs se retrouve dans la biographie spirituelle et très admirative que lui consacre ici Shirley du Boulay. Collant au plus près de son itinéraire, elle suit le moine bénédictin breton de l’abbaye de Kergonan, qui répond à l’appel du P. Monchanin en Inde et fonde avec lui l’asrham de Shantivanam, dans les méandres de sa quête d’absolu. Une vocation irrésistible, comme l’indique plus d’une page de son Journal : « Notre oeuvre ne peut réussir qu’à condition de se faire indien jusqu’au bout, depuis le plus profond de l’âme et du coeur jusqu’aux plus infimes détails de vie. » Vocation qui le conduit à la montagne d’Arunachala, où le marquent la rencontre de Ramana Marharshi et l’appel au dénuement total. Plus tard, ce sera la rencontre et l’influence du spirituel tamoul Gnanananda.
Nous le suivons ensuite dans sa vie errante, marquée par le passage dans les différents monastères et la participation au dialogue interreligieux. À certains moments, pourtant, il est difficile de savoir où se situe vraiment le P. Le Saux, qui pousse jusqu’à l’extrême sa plongée dans la mystique hindouiste. Comment articuler cette sorte de dilution avec le sens du Christ ou de la Trinité, par exemple ? Regardée au départ avec suspicion, son expérience va être peu à peu perçue avec sympathie dans le monde catholique et le rapprocher de personnalités comme Bedde Griffiths ou Raimon Panikkar. Tout en se libérant de nombreuses formes extérieures, en particulier dans le domaine liturgique, le P. Le Saux tient à concilier jusqu’au bout l’expérience de Jésus et la non-dualité chère à l’hindouisme, selon ses propres mots : « Ce “Je suis” brûlant, dévastateur, non plus même “Dieu est”, car qui est pour oser parler de Dieu ? Ceci est la grande grâce de l’Inde, qui fait découvrir le “Je suis” au sein de l’Évangile (Jean 8). »
Cette plongée dans la Grotte du coeur fascinera ceux qui s’intéressent aux mystiques d’Asie et à leur relation possible au christianisme. On regrettera cependant que l’auteur ne pousse pas davantage un questionnement critique ou interrogatif sur le personnage.