Préf. D. Poirot. Beauchesne, coll. « Théologie historique », 1998, 314 p., 246 F.

L'expérimentation humaine de la gloire de Dieu intègre tout l'univers sensible : voilà ce que souligne une lecture minutieuse des oeuvres de saint Jean de la Croix. Pierre Gouraud en apporte la preuve par une analyse très fine des deux principales oeuvres du grand mystique espagnol : le Cantique spirituel et la Vive flamme d'amour.
La première oeuvre se présente comme le chant de la nature glorifiée dans ses trois éléments : la tene, l'eau et l'air ; la seconde comme la transmutation de ces éléments naturels dans le feu de l'Esprit. Ce travail resitue, avec rigueur mais sans fausse complication, cette mystique dans son cadre théologique, rappelant les attendus de la gloire dans la tradition biblique, dans celle des Pères, et finalement dans la théologie spirituelle. Une table analytique permet de retrouver le vocabulaire dans les textes primitifs. L'intérêt spirituel de ce travail théologique est de rappeler la densité corporelle de l'unification de l'âme enflammée par l'amour de Dieu. La terre, l'eau et le feu symbolisent, dans la poésie sanjuanique, l'univers dans sa corporéité. C'est cet univers qui est unifié au fur et à mesure que l'âme, se laissant aspirer par l'Esprit, en arrive à partager la gloire de Dieu.
Dans le désir de trop prouver, l'auteur laisse peut-être dans l'ombre l'étape purgative de ce chemin glorieux. Certes, dans une logique teintée de néoplatonisme, il est tentant de retrouver dans les écrits de Jean de la Croix la transmutation des éléments primordiaux, mais il conviendrait plutôt d'y découvrir une logique de conversion, qui induit un ordre dans les éléments : d'abord l'eau, symbole de purification, puis le feu, symbole de la vie dans l'Esprit, la terre symbole de kénose à laquelle conduit l'Esprit, avant de nous introduire à l'air, symbole des deux, qui donne sens à ce chemin d'unification.