En cette période de rentrée, il est des paroisses où l’on procède à une « bénédiction des cartables ». Au cours de la messe dominicale, les enfants apportent leur cartable au pied de l’autel rejoints par les enseignants ou toute personne qui le désire. Ainsi tous se rassemblent le temps d’une prière et de la bénédiction. C’est une belle tradition, celle qui consiste à accueillir la présence mystérieuse de Dieu au cœur des études, du travail scolaire et de nos efforts de connaissance symbolisés par ces cartables.

Mais comment Dieu nous rejoint-il dans ces lieux de vie quotidiens dont la plupart n’ont aucune référence à la foi ? Comment Dieu nous rejoint-il dans un travail sans rapport direct avec sa révélation, sa parole, son action sacramentelle ? A ce sujet, Ignace de Loyola rapporte deux évènements très éclairants.

Le premier est tiré de son expérience d’étudiant. Alors qu’il décide  après sa conversion de reprendre l’école, pour être plus à même d’ « aider les âmes », il s’aperçoit qu’un grand désir de prier l’envahit, chaque fois qu’il doit se mettre au travail. Et il identifie là une tentation subtile du « Malin » qui cherche à détruire en lui la volonté de Dieu en l’amenant à négliger, au nom de la prière, la décision qu’il avait prise avec l’aide de Dieu : se former pour mieux Le servir dans le monde. Dieu ne peut pas se mettre en contradiction avec Lui-même. Pour nous, reconnaitre la présence de Dieu dans les études c’est respecter notre désir de nous former pour trouver notre juste place dans le monde. Car ce désir est en nous celui de Dieu.

Cette expérience faite par Ignace l’amènera beaucoup plus tard à écrire une lettre un peu longue mais étonnante aux étudiants de l’université de Coïmbra (Portugal). Ceux-ci, en effet, désertaient leurs études au profit de formes d’évangélisation excessives qui nuisaient à leur formation, mais aussi à leur salut et à la réputation de la Compagnie. Etonnamment, Ignace ne juge pas cela comme un défaut d’obéissance qui nécessiterait un rappel à l’ordre. Au contraire, il s’appuie sur leur désir trop généreux de servir l’Evangile, pour les inviter à y reconnaitre l’œuvre de Dieu en eux, et à cultiver humblement dans les études les dons et compétences qui feront d’eux des coopérateurs plus avisés de la mission de Jésus-Christ.

Toute formation est donc un temps de conversion. A l’image de Jésus dans son abaissement, chacun de nous s’enfonce dans un apprentissage qui rend efficaces nos talents liés et travaillés avec ceux des autres. Non pour un prestige personnel, fût-ce au nom de l’Evangile comme les étudiants de Coïmbra, mais au profit d’un monde plus responsable, auquel tous puissent participer. La bénédiction de Dieu sur nos sacs et nos cartables nous envoie ainsi, dans la joie et la confiance, travailler à un monde qui reflète davantage la bonté de Dieu et le salut de tous accompli en Jésus-Christ.