Depuis le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église (Ciase), nous ne pouvons plus être les mêmes et faire comme s'il n'avait pas existé. Il nous oblige. Quelque chose de neuf a surgi là, nous entraînant dans une vaste refonte de nos façons d'être en relation les uns avec les autres. Avec ce travail, le côté systémique de tant de comportements a été mis en lumière, comme l'incapacité à nommer, la culture du silence et de l'entre-soi, le recours à une piété falsifiée et dominatrice, etc. Tout ceci n'est plus de mise. Il est urgent que nous changions notre regard, notre parole, notre cœur.

Nous le savons maintenant avec clairvoyance, c'est au cours des accompagnements spirituels, de la confession et dans les rapports d'autorité et d'obéissance que les abuseurs ont trouvé leurs terrains favoris pour perpétrer leurs crimes. Pourquoi ces terrains-là ?

Peut-être avions-nous perdu de vue combien ces relations sont exigeantes et demandent une extrême vigilance ? Peut-être avons-nous cru que notre « être chrétien » était suffisant pour que l'Esprit nous inspire ? Sûrement. En tout cas, nous avons outrepassé les limites sans même nous rendre compte qu'il y en avait, car nous étions tellement sûrs de détenir la vérité.

Nous avons été embarqués et nous ne le savions pas toujours. Tout cela a un prix très élevé et il ne s'agit pas de le minorer. Des hommes, des femmes, des enfants ont été victimes dans leur chair et leur esprit. Des vies, de si nombreuses vies, ont été détruites et cela, aujourd'hui, nous le savons car beaucoup ont eu l'immense courage de témoigner. Pourtant, encore, un certain nombre parmi nous minimisent ou pensent qu'il est temps de passer à autre chose.

Au contraire, je crois – au sens fort du terme – qu'il nous est vital d'intégrer toute cette mémoire à nous transmise par la voix courageuse des personnes victimes. Peut-être allez-vous trouver un peu excessif que j'emploie ainsi le « nous ». Je le fais à dessein, non pour que la culpabilité ou l'accablement nous atteignent, mais parce que