Lessius, coll. « Au singulier », 1998, 284 p., 149 F.

A qui recherche un commentaire renouvelé des Exercices spirituels qui donne à penser dans le contexte de la culture contemporaine, on ne peut que recommander cet ouvrage du supérieur général de la Compagnie de Jésus.
La première partie traite du texte même des Exercices. L'auteur met au service de son commentaire sa compétence linguistique sa grande culture, sa connaissance de la tradition orientale. Les particularitéslinguistiques du texte sont abordées de façon suggestive : l'expression « exercices spirituels », à laquelle nous sommes habitués, associe deux champs sémantiques repérables dans les termes (« exercice » et « spirituel »), qui expriment en fait l'opposition et la tension entre l'effort humain, d'une part, et, de l'autre, la gratuité du don du Seigneur ; l'analyse rend compte aussi du jeu de quatre acteurs : Ignace, celui qui donne les exerdces, celui qui les fait et Dieu.
Ainsi prend place le cadre fécond d'une étude qui met peu à peu en mouvement une intelligence approfondie des Exercices. C'est la surprise du regard neuf qui apprend à faire attention au texte dans sa précision, à faire droit aux mots employés, à leur fonction dans les effets de sens. Le rôle de l'imagination est éclairé, en montrant que les Exercices sont « un chemin à travers les images » où joue le passage de l'image-miroir à l'image-icône. Enfin, notons qu'un texte est heureusement tiré de l'oubli des commentateurs les « règles pour distribuer les aumônes », mises subtilement en relation avec l'amour préférentiel pour les pauvres.
Dans la deuxième partie, l'auteur nous fait réfléchir sur « la confiance d'Ignace dans la parole pour rencontrer Dieu ». C'est, entre autres, le sens du colloque qui met en oeuvre la parole de l'homme et la réponse non verbale de Dieu par le moyen des motions. L'étude se poursuit sur le Journal spirituel, les Lettres et leur formule de conclusion, enfin sur les Constitutions à partir de l'expression « une certaine voie vers Dieu », qui utilise la typologie du chemin, celui d'Ignace pèlerin La troisième partie, beaucoup plus brève, donne un écho de la vie du corps de la Compagnie dans sa diversité.
Le titre donné à l'ouvrage renvoie à un lieu essentiel des exercices, celui du « troisième degré d'humilité », qui a son fondement dans l'amour fou de Dieu pour l'homme, dans la passion de Jésus, en fonction des choix significatifs opérés par Ignace à partir des récits évangéliques.