Comme les individus, les nations et les peuples aimeraient dire ce que disait la « femme gauchère » au moment où elle s'éloigne de son mari dans un roman de Peter Handke : « Je ne serai plus jamais humiliée... » Illusion, car dès qu'on est en relation avec d'autres, on court le risque de l'humiliation : il faudrait être seul, s'enfermer dans la solitude, pour ne jamais être humilié. L'humiliation est un risque permanent de la vie commune.
Il y a donc, selon les circonstances et les temps, des nations humiliées et des nations sûres d'elles. L'histoire biblique et l'histoire du peuple juif le montrent. Les états d'optimisme et de pessimisme, de confiance, de défiance, de découragement, caractérisent les nations comme les individus. Puis les situations changent et s'inversent. La position n'est jamais stable : on monte et on descend. L'histoire de l'Europe connaît pour chacun de ses peuples ces histoires d'humiliation réelle ou estimée. Mieux vaut reconnaître ces réalités élémentaires, ne pas s'imaginer des nations purement raisonnables et rationnelles. Car la raison ne sort pas tout armée des dossiers et du cerveau des experts, elle est plutôt une manière de surmonter des passions. Il y a une dimension affective du fait national. « Les nations sont étranges les unes aux autres, comme le sont des êtres de caractères, d'âges, de croyances, de moeurs et de besoins différents » (Paul Valéry). Le nationalisme et le populisme depuis le XIXe siècle sont peut-être des réactions à des humiliations. Le mot humilié comportant une nuance plus affective encore que le mot nation, les nations humiliées sont donc un terrain d'affectivité au carré. L'humiliation est d'abord le sentiment d'une injustice, mais il est aisé de s'y complaire, car c'est aussi une représentation (« se sentir humilié ») et souvent une passion morose.
Il y a donc, selon les circonstances et les temps, des nations humiliées et des nations sûres d'elles. L'histoire biblique et l'histoire du peuple juif le montrent. Les états d'optimisme et de pessimisme, de confiance, de défiance, de découragement, caractérisent les nations comme les individus. Puis les situations changent et s'inversent. La position n'est jamais stable : on monte et on descend. L'histoire de l'Europe connaît pour chacun de ses peuples ces histoires d'humiliation réelle ou estimée. Mieux vaut reconnaître ces réalités élémentaires, ne pas s'imaginer des nations purement raisonnables et rationnelles. Car la raison ne sort pas tout armée des dossiers et du cerveau des experts, elle est plutôt une manière de surmonter des passions. Il y a une dimension affective du fait national. « Les nations sont étranges les unes aux autres, comme le sont des êtres de caractères, d'âges, de croyances, de moeurs et de besoins différents » (Paul Valéry). Le nationalisme et le populisme depuis le XIXe siècle sont peut-être des réactions à des humiliations. Le mot humilié comportant une nuance plus affective encore que le mot nation, les nations humiliées sont donc un terrain d'affectivité au carré. L'humiliation est d'abord le sentiment d'une injustice, mais il est aisé de s'y complaire, car c'est aussi une représentation (« se sentir humilié ») et souvent une passion morose.
Les leçons des traités de paix
Dans l'histoire européenne, riche en rapports de guerres et de paix entre les nations, il est une comparaison classique entre les traités qui humilient le vaincu et les traités qui le respectent, entre le traité de Vienne en 1815 et le traité de Versailles en