Bayard, coll. « Evangiles », 2003, 168 p., 19,90 €.

« L'ambition de ce livre, sur un texte si connu, est d'aller aussi loin que possible dans la présentation et l'interprétation, tant du point de vue exégétique que catéchétique, initiatique et théologique. De l'immense littérature déjà produite sur ce texte, nous retiendrons tous les éclairages stimulants, tout ce qui peut nourrir une plus riche compréhension et une plus profonde méditation. (…) Nous serons entre autres attentifs à la portée ecclésiale de cet épisode. Car, dans une conjoncture d'Europe occidentale où le croyant a "mal à l'Église", il est bon de lui redire la chance qu'elle représente sur le chemin du vrai Dieu. »
Ces quelques mots, tirés de l'introduction du livre, ne livrent pas seulement une ambition ou un programme. Ils donnent aussi — chose extrêmement rare sous la plume d'un auteur — une description stricte du livre lui-même. Bruno Chenu, qui vient de nous quitter prématurément, introduit tout d'abord son sujet en montrant l'actualité de ce passage d'Évangile dans la littérature et la vie de l'Église contemporaine. Puis il se livre, pas à pas, à une lecture qui puise réellement et profondément à toutes les sources de l'exégèse contemporaine en les mettant en relation et perspective depuis l'analyse historico-critique jusqu'à l'analyse sémiotique ou narratologique.
L'art tout particulier de Bruno Chenu consiste à rendre accessible les concepts les plus ardus, les lectures les plus complexes, en interrogeant aussi l'histoire de l'interprétation. Peu à peu, le texte s'enrichit, s'éclaircit, s'illumine de mille feux. Une excursion dans l'univers de l'art vient encore illustrer le propos. Les derniers chapitres nous montrent comment ce texte peut nous aider à vivre dans cette « religion pèlerine » qui est aujourd'hui notre lot. Comment il nous aide à faire le lien entre cheminement et communauté, entre subjectivité et vie ecclésiale. Comment, enfin, il peut nous guider dans la voie que le Christ, à travers lui, nous propose.
Bruno Chenu a écrit de nombreux ouvrages. Son dernier en donne comme la clé. Il nous fait comprendre comment passion des hommes et passion de Dieu se rejoignent immanquablement dans cette vie ecclésiale dont il avait détaillé les deux traits marquants (vie de disciple et urgence prophétique) dans sa toute première œuvre : L'Église au cœur (Bayard, 1982).