Tout d’abord, il convient de reconnaître que malgré l’ampleur de l’événement, (150 000 personnes étaient rassemblées pour la célébration de l’eucharistie sur le lieu du martyr, le 21octobre, avec 17 évêques, le nonce apostolique, le Premier ministre malgache et l’Ambassadeur de France), Jacques Berthieu est encore peu connu dans la Grande Ile. Sa canonisation a cependant mis en avant trois éléments, qui gardent toute leur valeur pour aujourd’hui : la charité, la chasteté et la foi.
La charité : si à l’appel d’un vieil homme épuisé, il n’avait pas quitté l’avant du convoi et la protection des militaires pour se rendre à l’arrière avec les derniers, Jacques Berthieu n’aurait pas été pris par les Menalamba et tué. Le pays est aujourd’hui dans une situation dramatique : la pauvreté s’aggrave, les personnes âgées, longtemps l’objet d’un grand respect dans la culture traditionnelle, sont en train de perdre cette protection et les plus faibles sont les premières victimes. L’action de Jacques Berthieu peut inspirer l’Eglise dans son attention aux plus petits et dans la remise en valeur d’éléments fondamentaux de la culture malgache.
La chasteté : s’il n’avait pas dénoncé les mœurs dépravées de l’officier commandant le détachement chargé de les protéger, ce dernier ne l’aurait sûrement pas laissé partir à l’arrière sans protection. Et s’il n’avait pas incité les couples chrétiens à vivre la fidélité, il n’aurait pas subi le martyr qu’il a subi (il a été circoncis puis émasculé avant d’être exécuté). Aujourd’hui, la famille
est menacée d’éclatement, à la fois par la pauvreté et par l’irruption de la mondialisation. Pour l’avenir de la société autant que le sien propre, l’Eglise est invitée à prendre soin de la famille. Et cela nous conduit au troisième point.
La foi : c’est pour avoir refusé de renoncer à sa foi que Jacques Berthieu a été tué. Plus largement, son désir d’annoncer l’Evangile est au cœur de son action pour la justice et pour la famille. Sur ce dernier point, il était connu pour sa réponse aux parents venant demander le baptême pour leur enfant : il leur posait comme condition de prier en famille chaque soir. Ainsi, le couple se fortifiait dans la foi et élevait ses enfants dans l’intimité au Seigneur : la fidélité qu’il prônait trouvait là sa source. Par ailleurs, lorsqu’un couple venait demander le mariage, il invitait la communauté chrétienne à lui construire une maison. Cette foi simple et agissante n’a rien perdu de son actualité.
Grâce à cette canonisation, autant par l’intercession de Jacques Berthieu que par la mise en valeur de sa manière de procéder, l’Eglise à Madagascar a la possibilité de retrouver un élan dans la période critique que le pays traverse.