Repartons de l’expérience initiale, et jamais totalement quittée, de cette vie en fratrie qui met son empreinte sur nos relations adultes. Il nous sera alors possible d’approfondir ce qui ouvre à la promesse d’une fraternité dans notre relation aux autres, et qui appelle conversion et combat intérieur pour demeurer ouverts à l’Esprit en nous mettant en mouvement vers l’autre, notre semblable.
Frères et sœurs pour la vie
Tel est le titre du récent ouvrage qu’une psychologue, Lisbeth von Benedek, écrit à partir de son expérience analytique des relations entre frères et sœurs. Longtemps regardé à partir de la relation privilégiée à ses parents et des complexes qui en découlent, l’enfant est aujourd’hui perçu et compris aussi comme frère ou sœur, comme membre d’une fratrie avec son empreinte et son histoire propres. Les dictionnaires soulignent le caractère récent de cet intérêt pour ce domaine. Ainsi le Petit Robert signale-t-il que le mot « fratrie », « ensemble des frères et sœurs d’une famille », apparaît vers 1970, avec l’essor des enquêtes démographiques et des sciences humaines.À cette époque correspond aussi le début d’une croissance continue des familles « recomposées », des « constellations familiales », comportant au moins deux ou trois fratries, voire davantage, à la suite de divorces et de remariages. Si la fratrie désigne les frères et sœurs de père et mère identiques, les ruptures et recompositions ne restent pas sans effet sur la vie et les relations propres à chacune d’elles. En fonction des âges, du rang dans la fratrie, des situations et héritages culturels, l’incidence sera bien différente, mais un(e) aîné(e) se trouvera renforcé(e) ou fragilisé(e) dans son rôle, un(e) autre valorisé(e) dans son autorité ou rejeté(e) comme bouc émissaire, etc.
Plus qu’auparavant, semble-t-il, les relations de fratrie ou celles qui en sont issues construisent donc notre identité : nous ne sommes pas seulement fils ou fille de qui nous tenons le nom, nous sommes aussi frère ou sœur de qui nous aimons ou fuyons la présence, quelles qu’en soient les raisons « affichées ». La difficulté du cadet à trouver sa place entre l’aîné et le benjamin le poussera souvent à s’isoler, alors que le « petit dernier » aura tendance à jouer jusqu’au bout de son dési...
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