Il semble curieux d'associer douceur et douleur. Nous aimerions un Dieu « doudou », nous faisant oublier nos maux et nos angoisses, en un mot nos traumatismes. Pourtant trauma et douceur sont bien liés. Depuis peu, l'exégèse étudie le rapport de la Bible avec le trauma1. Bien sûr, l'humanité a vécu des expériences traumatiques depuis déjà bien trop longtemps. Ce n'est pourtant que depuis la Seconde Guerre mondiale que se sont développés des outils pour mieux analyser ce phénomène. On distingue notamment le « traumatisme », comme événement extérieur, du « trauma » pour désigner l'effet intérieur et psychosomatique induit. L'ouverture de ce champ de recherche m'apparaît fertile, non pas au titre d'une énième « méthode » d'analyse, mais en tant que possibilité pour les victimes, les opprimés et les abusés de se réapproprier la Bible. La Bible est une littérature de trauma, un moyen pour les victimes d'exprimer l'impensable. La douceur, que je définirai simplement comme l'opposé de la violence, ne me paraît pensable que dans ce cadre, pour éviter tout angélisme. Il faut regarder en face l'histoire du peuple d'Israël : elle s'accompagne d'indicibles traumatismes.

Cette histoire commence aux environs du XIIe siècle avant notre ère, durant la crise dite du « Bronze ancien ». L'Égypte et la Mésopotamie sont désorganisées. Entre ces deux empires affaiblis, l'archéologie montre l'apparition d'un royaume, en réalité, plutôt de deux : Israël au Nord, avec Samarie pour capitale, et Juda au Sud,