Préf. L. Wilson.
Bayard, 2009, 250 p., 15,50 euros.
 
Ce livre est poignant : la maîtrise de l’écriture est au service de témoignages qui montrent crûment les multiples fa­cettes de l’aventure des Communautés d’Emmaüs. La moitié de l’ouvrage dresse un tableau contrasté des visages burinés de ceux et celles qui ont partagé un temps la vie des communautés locales. L’autre moitié de l’ouvrage décrit les itinéraires des responsables et des amis qui ont permis au Mouvement créé par l’abbé Pierre de vivre, de se structurer et – à la surprise de beaucoup – de se maintenir au-delà de la mort du fondateur en jan­vier 2007. Ce qui aurait pu n’être qu’un patchwork coloré est centré autour de l’inspiration première, restée vivace : l’homme ne vit pas seulement de pain, mais aussi d’amitié, de confiance et de relations – autant d’aspects de la parole du Dieu incarné.
Bien que la démonstration didac­tique ne soit pas l’objectif de l’ouvrage, le lecteur sera certainement frappé du contraste entre d’une part l’approche sociale de l’administration baignée dans une culture individualiste où l’on tente de répondre immédiatement à des be­soins matériels individuels, et d’autre part la « charité » – mot injustement décrié – qui vise à restaurer les liens et respecte finalement davantage le caractère propre de la personne.
La préface-témoignage de l’acteur Lambert Wilson – qui joua le rôle de l’abbé Pierre dans le film de Denis Amar Hiver 54 – sonne juste : ni admi­rateur aveugle, ni comédien distancié, mais homme sensible qui a su recon­naître, au détour des rencontres qu’il a eues avec lui, la part de sagesse spiri­tuelle qui rayonnait du visage d’Henri Grouès, alias abbé Pierre.