Me voici à Bangui. Je suis immédiatement plongé dans un autre monde : coloré, vivant, relationnel. Un monde chatoyant aux mille couleurs, à la circulation chaotique, aux rires sonores, aux veillées funèbres chantantes et dansantes. Souvent, je suis interpellé. Il me faut quelques jours pour m'adapter à ce nouvel environnement. Quittant l'Europe où prédomine l'angoisse du vide et de l'absurde (ah ! ce cœur inquiet que l'on cherche à combler par le divertissement et la consommation !), je perçois ici une angoisse plus radicale, celle du destin et de la mort. Pas un jour où elle ne frappe à la porte ! Je me sens pourtant bien dans cet univers. Il me revitalise. Et puis, comme jésuite, n'ai-je pas fait vœu de pauvreté, de totale remise de moi ? Souvent, j'y ai réfléchi. Mais ce que signifie vivre de pauvreté effective, je ne le sais pas vraiment. Je pressens qu'il va m'être donné d'en découvrir les affres, mais aussi la paradoxale richesse…

28 octobre 2008

Je suis parti avec l'équipe JRS sur la route qui mène à Bossangoa, située au nord-ouest de la République centrafricaine. Nous filons à toute allure. La Toyota rugit aux sollicitations de son conducteur. Évitons cette poule, ce cabri et les mille obstacles qui mettraient à l'épreuve les nerfs de tout conducteur européen chevronné. À l'intersection de Bossembélé, nous prenons sur la droite et nous engageons sur les pistes en latérite que nous ne quitterons plus.

Lors de cette mission de reconnaissance des besoins en éducation de l'Ouham, au détour d'une piste défoncée, un chef rebelle nous intime l'ordre de descendre du véhicule. Sa mine patibulaire n'augure rien de bon. Nous expliquons qui nous sommes et quels sont nos objectifs. Dans une telle situation, le temps se suspend et tout prend intérieurement un autre relief. Je suis ramené à l'essentiel, redécouvrant la racine de ma foi. Comment traverser la peur ? Sans exagérer le péril, je sais que je ne