La migration et l’exil sont au fondement même de l’expérience de foi, la Bible nous le révèle. Mais bien davantage, l’Écriture ouvre un discernement qui depuis Jésus-Christ fonde la pensée sociale de l’Église et soutient l’action des chrétiens au service d’une société plus accueillante et fraternelle. Dans ces pages extraites de Réfugiés et nouvelles migrations : une interpellation pour la conscience chrétienne (Éditions de l’Institut d’Études Théologiques, 1993, pp. 120-124), le P. Jean-Marie Faux développe cette perspective anthropologique et spirituelle.
 

 

Les migrations dans l’Écriture sainte


Des migrations, il y en a eu à toutes les époques de l’histoire sainte, et de toutes les natures. C’est Caïn voué à l’errance mais protégé, malgré son crime, par un signe mystérieux dont Dieu l’a marqué (Gn 4,15). C’est Abraham invité à tout quitter pour partir vers le pays et vers le destin que Dieu lui promet (Gn 12,2) : l’histoire de l’alliance commence par un expatriement. Plus tard, Joseph est emmené en Égypte où, ayant fait fortune, il peut accueillir ses frères chassés de leurs pâturages par la famine (Gn 37–50). Pendant des gé­nérations, un peuple va grandir dans la dure condition de l’immigré, utile voire nécessaire mais mal aimé, discriminé et toujours menacé (Ex 1). Un autre exode fondateur arrache le peuple à la servitude et, après la longue épreuve du désert, le conduit à la Terre promise. L’expérience a marqué Israël et il ne peut l’oublier. Non seulement la Loi invite les Israélites à se souvenir qu’ils ont été étrangers dans le pays d’Égypte et par conséquent à aimer l’étranger, mais elle leur interdit aussi de se comporter en propriétaires du pays qu’ils ont reçu : « Car la terre m’appartient [dit Dieu], et vous n’êtes pour moi que des étrangers et des hôtes » (Lv 25,23). Première amorce d’un thème qui va s’amplifier et se diversifier : l’homme est un étranger sur cette terre. Quelques siècles plus tard, c’est l’exil, la