Entretiens avec P.-O. Boiton. Préf. J.-M. Lustiger. Nouvelle Cité, coll. « Vie des hommes », 2007, 157 p., 18 euros.

Ce livre d’entretiens est un hommage très vivant à Patrick Giros et à l’association « Aux captifs la libération » qu’il a fondée il y a vingt-cinq ans dans le diocèse de Paris. C’est en même temps le récit d’une triple rencontre spirituelle, et tout d’abord celle d’un jeune journaliste chrétien, Pierre-Olivier Boiton, avec un militant, Jean-Guilhem Xerri, président de l’association. Dans son engagement comme dans l’intuition du fondateur, les gens de la rue ne sont pas d’abord un problème social à traiter, mais des personnes, des frères et des soeurs en Jésus-Christ, « des pauvres à aimer », dont la quête de parole et de proximité interroge la foi et évangélise le regard du jeune chrétien : « Se présenter devant l’eucharistie comme on se présente devant les personnes de la rue, avec ses pauvretés plus qu’avec ses richesses : le parallèle est osé, non ? »
C’est aussi la rencontre d’une Église avec le monde de la rue la nuit, « une rencontre à mains nues » avec une population qui bien que marquée par l’exclusion et souvent l’abandon, est partie intégrante du peuple de Dieu, de la paroisse. « Aux captifs la libération » n’a pas pour vocation « d’en faire des croyants, mais des vivants », à la manière dont Jésus lui-même, par la force du dialogue et de sa liberté libérait les exclus de son temps de ce qui les mettait à l’écart. « Nous serons jugés sur le fait de visiter et non de guérir, de donner à boire et non d’étancher… »
Enfin, c’est la rencontre discrète et suggestive d’un homme avec son Dieu, au détour des mots et propos. Des quatre méditations évangéliques qui ouvrent chacune des quatre parties du livre jusqu’aux gestes les plus concrets et fraternels, on goûte particulièrement la continuité et l’unité profonde qu’opère la foi entre l’accueil du Christ dans sa Parole, le regard porté sur les hommes et l’eucharistie qui se fait service attentif du frère dans la rue et qui nourrit ainsi une dynamique du désir : « Un désastre, c’est quand on n’a plus son astre… L’étymologie de ce mot est desidere, “sans étoile”. Un autre mot a la même racine : le désir. Celui qui désire, c’est celui qui cherche son astre, sa source. »