« On aurait besoin ici d'une grand-mère qui écoute », m'avait dit la directrice de la section d'enseignement spécialisé1 du collège voisin, ajoutant : « Un adulte qui soit avec ces enfants, non dans une relation d'enseignants, ni de parents, ni de professionnels, mais là, gratuitement. Dans un contexte où la rencontre avec les adultes se joue trop souvent sur fond de peur ou de totale indifférence, ce serait très souhaitable ! » Demande qui a fait tilt en moi ! Arrivée récemment en Seine-Saint-Denis, j'en étais à l'étape de la découverte de notre quartier et de la recherche d'un lieu où je pourrais davantage m'investir avec ce que je suis et dans le projet de la congrégation. À la retraite – l'âge d'être grand-mère, sans l'être –, la situation d'enfants au parcours scolaire difficile ne me laissait pas indifférente. Comment aller plus loin ?

Après une réflexion personnelle et communautaire, une concertation avec les enseignants et la Confédération syndicale des familles2, j'ai donc accepté d'intervenir comme bénévole de cette association auprès des enfants de sixième et de cinquième. Sous certaines conditions de part et d'autre : en particulier, je me refusais à suppléer éventuellement au manque d'enseignants et, bien entendu, je m'engageais à respecter le caractère public de l'établissement.

« C'est bien de lire ! »

Dès le début, il a semblé que la porte d'entrée à l'écoute pouvait être la lecture qui présentait de grosses difficultés à ces enfants. Au cours de la première étape (les choses ayant évolué par la suite), j'étais à la disposition de ceux qui souhaitaient faire avec moi quelques activités ayant trait à la lecture, deux matinées par semaine. Rencontres interpersonnelles qui ont vite débordé ce cadre, dans une parole disant parfois le pourquoi de leur retard scolaire tel qu'ils le ressentaient.

Jimmy, treize ans et demi, m'explique qu'il a beaucoup manqué en primaire parce que ses parents se battaient… Ensuite, on oubliait de l'amener à l'école. « Maintenant, ça va ! Je suis dans une famille d'accueil ! – Ça va ?… » S'il n'est plus témoin de scènes de violence, Jimmy en demeure marqué pour longtemps.

Shabnam est venue en France à l'âge d'un an, sa mère est