À lire la Bible, d'un bout à l'autre, de la Genèse à l'Apocalypse, on chercherait en vain le moindre éloge de la cécité. Le fait pour l'homme d'être aveugle (ou de le devenir) y est toujours considéré comme ce que le bon sens a tôt fait d'estimer : c'est un mal, un malheur, une déficience ou une perte de l'intégrité de l'être humain. Il faudrait d'ailleurs en dire autant de l'atteinte, plus ou moins irréparable, de tout autre de nos cinq sens. Aucun, à vrai dire, ne peut se substituer aux autres pour procurer le mode spécifique de présence aux êtres que chacun permet. Un aveugle de naissance ne saura jamais ce que sont les couleurs. Pis : il ne connaîtra jamais la lumière. Il vaut mieux dire tout ceci d'emblée pour qu'on ne s'attende pas à trouver ici la moindre justification, à plus forte raison l'éloge, de la cécité. Sans doute n'est-ce pas pour rien que Jésus l'a, par analogie, identifiée, non seulement au péché, mais à son fruit extrême : la perdition.

Être aveugle et le devenir

Je ne suis pas né aveugle. Je le suis devenu progressivement à l'âge de