Des guides hors pair comme à la chapelle Redemptoris Mater,   des rencontres d’exception comme à la Curie des jésuites, à la Civilta cattolica, ou encore à l’université Grégorienne disposent bien l’esprit pour cela.  Mais rien ne remplace cette manière de voir avec les yeux des autres, d’entendre avec leurs oreilles, de toucher avec leurs mains et leurs pieds, d’aimer un peu plus  avec leur cœur. Non seulement notre vision en est élargie et le sens qu’on en retire utilement enrichi. Mais ce qu’Ignace de Loyola nomme  « application des sens » et recommande à chacun d’expérimenter avec les  personnages d’une scène évangélique contemplée, ce que nous avons vécu dans nos visites de sites d’Eglise à Rome,  construit entre nous un « sentir commun ». Qu’est-ce à dire ?

La réalité nous touche et nous parle diversement, et nos sens réagissent différemment à ce que nous percevons. Nos goûts, nos sentiments, nos analyses, nos décisions peuvent diverger, même  fortement, en fonction de toutes sortes de raisons : éducation, histoire, culture, croyances,... Ce qui nous est commun n’est donc pas une réduction à l’identique des points de vue et interprétations, et pas non plus une complémentarité un peu illusoire. Ce qui crée et développe le lien communautaire, c’est  de sentir le Christ qui nous touche et nous parle dans les expériences que nous partageons les uns avec les autres, même quand elles nous paraissent très éloignées des nôtres par le goût, le sens, la réalité. L’Esprit Saint peut ainsi inspirer à d’autres des significations et des orientations auxquels il me pousse moi-même à ne pas adhérer ou même à m’opposer, et pourtant à accueillir de sa part. C’est pourquoi contempler ensemble est un formidable moment de fraternité et de vérité ecclésiale, aux allures de Pentecôte. Ma vision pourra s’en trouver enrichie ou confirmée, ou bien contestée. Mais ma foi, elle,  en sera à coup sûr grandie, et ma capacité d’aimer comme le Christ, élargie jusqu’à inclure des personnes à qui je me sens peu accordé.

Le pape François nous invite avec force à éprouver ce « sentir commun » dans La joie de l’amour, lorsqu’il écrit en introduction que « le temps est supérieur à l’espace » et que les interprétations différentes le resteront « jusqu’à ce que l’Esprit nous conduise à la vérité tout entière et que nous pourrons tout voir « dans le regard du Christ ».
Contempler ensemble en fut pour nous une étape féconde.