La figure du pauvre, très présente dans la tradition chrétienne, appelle à des retournements. Tout simplement, d'abord, pour tourner la tête du côté où l'on n'a pas envie de voir. Ensuite, pour reconnaître, en ces lieux redoutables, des visages, ceux des frères et des sœurs qui nous manquent. Enfin, pour découvrir que rien de décisif pour une existence véritablement humaine ne peut se jouer dans l'ignorance et l'oubli de ceux qui d'habitude ne comptent pas. Leur rencontre peut alors devenir une expérience de liberté et ouvrir un espace de respiration.

Les pauvres sont cachés dans les plis de nos peurs

Qui accepterait spontanément de se voir désigner comme « pauvre » ? Ce simple fait montre que l'on a affaire à une réalité qui met tout le monde mal à l'aise, et donc se dérobe. Et pourtant, les statistiques sont là : elles indiquent que certains disposent d'à peine de quoi vivre et sont condamnés à exister au jour le jour, dans une extrême précarité.

Le pauvre, c'est celui qu'on ne voit pas, qui ne compte pas, dont on oublie jusqu'à l'existence, dont on n'attend rien, et qui, de ce fait, ne peut trouver à exprimer ce qu'il porte, ce qu'il est.

S'intéresser à ces personnes humiliées revient à chercher à faire entrer dans ses préoccupations ceux qui, a priori, n'y figurent pas, ceux avec qui, d'habitude, il n'y a pas de rapport vivant et continu, ceux qui relèvent d'un autre monde et font résonner au