Quand les images ont-elles eu droit de cité dans le christianisme ? Répondre à cette question apparemment simple conduit à l'humilité. On ne conserve qu'une part mineure des mosaïques antiques, parure la plus pérenne des églises, et, en dehors des catacombes, on est incertain du nombre de fresques et peintures vouées au culte, plus fragiles et plus rarement préservées. L'archéologie indique un horizon enfoui : déjà, vers 240, à Doura-Europos dans l'actuelle Syrie, une synagogue est ornée d'histoires bibliques sur ses quatre murs ; le baptistère de la maison chrétienne voisine n'est pas en reste. Seules des conditions exceptionnelles de conservation ont permis que ces fresques traversent les siècles mais il est difficile de mesurer ailleurs l'étendue des pertes1. Toute prise de position sur l'apparition des images chrétiennes doit donc admettre qu'elle interprète les données qu'elle possède à partir de bases ténues.

Mais, plus fondamentalement, on peut dire avec certitude que la foi chrétienne naît de la rencontre d'un visage : celui du Ressuscité, vivant au matin de Pâques, qui atteste que l'homme Jésus est bien Dieu venu dans la chair. « À bien des reprises et de bien des manières, Dieu, dans le passé, a parlé à nos pères par les prophètes ; mais à la fin, en ces jours où nous sommes, il nous a parlé par son Fils, rayonnement de la gloire de Dieu, expression parfaite de son être qui, après avoir accompli la purification des péchés, s'est assis à la droite de la Majesté divine, dans les hauteurs des cieux » (He 1, 1-3).

Les étapes de la diffusion des images

Ces préalables étant posés, on peut oser tracer à grands traits l'histoire de l'acclimatation des images dans l'Église ancienne. La formule de Maurice Blondel, selon laquelle le développement de la Tradition ecclésiale est le passage d'un « implicite vécu » à un « explicite connu2 », en éclaire la dynamique. La première phase est ainsi un temps où