En une dizaine de chapitres alertes, inspirés à la fois par l'évangile de Jean, des réflexions spirituelles et son propre parcours d'homme et de religieux, Adrien Candiard nous entraîne sur ce chemin où l'amour de l'autre est « toujours dérangeant », où nous sommes atteints au cœur par le regard du Fils. Marqué par le combat de la prière, qui nous vaut ici un beau développement sur l'épisode de Jacob et de l'Ange, ce chemin renvoie également au défi de la fraternité au quotidien : « Le combat de Jacob n'est pas seulement ce corps-à-corps avec Dieu : c'est un combat pour faire la paix, et c'est pour cela que Dieu est présent » (p. 55). C'est donc au cœur de cet affrontement qu'il nous revient d'annoncer le Royaume, à travers notre vie même. Gardons-nous alors de séparer trop vite l'amour humain de l'amour de Dieu : le premier n'est-il pas expérience de sortie de soi, mais aussi de faiblesse, comme par pédagogie de la rencontre divine ? Nous voilà du coup bien loin d'une recherche de perfection moralisante : « Le bon Dieu n'est pas que pour les saints, droits dans leur auréole, raides sur leurs principes. Il est aussi pour ceux qui se débrouillent, ceux qui s'arrangent, les rusés, les filous » (pp. 93-94).

Il est donc urgent, souligne l'auteur, de nous débarrasser d'une conception trop verticale de la vocation, vue exclusivement comme un appel extérieur. Tout au contraire, « discerner notre vocation, réaliser notre vocation, vivre une vie chrétienne, c'est apprendre à nous libérer du poids de nos fantaisies, de nos envies du moment, de nos tocades, pour nous concentrer sur notre désir le plus vrai, celui qui nous constitue et nous fait avancer, celui qui nous appelle vers le bien. Celui auquel le Christ faisait allusion quand il nous a dit à nous aussi : “Quand tu étais sous le figuier, je t'ai vu” ». Alors, le chemin se fait traversée de la peur, avancée ici-bas sur les eaux mouvantes de l'existence : « Notre Dieu est le Dieu du présent, et il est aussi le Dieu d'ici » (p. 143). Le Dieu de la joie des noces de Cana.

Voilà une belle manière, fluide et légère, de renouveler le sujet, sans pour autant se trouver piégé par l'opposition souvent faite entre vocation baptismale et vocations spécifiques. Ce livre peut tout à fait être conseillé à un jeune en recherche comme à des laïcs soucieux de l'approfondissement de leur foi. Il est déjà très favorablement accueilli en librairie.