L'image que beaucoup ont d'Ignace est plus teintée de volontarisme et de fonctionnement militaire que d'approche amoureuse de Dieu. Ignace parle peu d'« amour » ; pourtant le dernier des exercices spirituels qu'il propose est une « contemplation pour parvenir à l'amour » 1. Quel secret entendre là ?
A l'expérience comme dans le texte des échos, des retours de thèmes, de tonalités, voire d'expressions qui ont habité l'ensemble de l'expérience des Exercices apparaissent. Se rendre sensible à ces fils qui parcourent comme une trame le livret ignatien peut permettre de goûter davantage à la profondeur et à la fécondité de cette contemplation que je voudrais ici relire à la fois comme l'expression d'une union originale à Dieu et dans son rapport à l’œuvre pascale.


L'UNION À DIEU EN ACTES


« L'amour se met dans les actes 2 plus que dans les paroles », c'est ce qu'Ignace prend soin de rappeler tout d'abord à qui désire « parvenir à l'amour » (230). Un double sens est ici à entendre : l'amour en actes, c'est celui qui se vit là où l'homme agit, c'est aussi celui qui est effectif, réalisé, libéré de la seule intention S'être laissé travailler par Dieu conduit au désir d'aimer en actes, à un amour qui, déjà, peut passer dans les actes. Or cet amour n'est pas sans rapport avec la vocation de l'homme telle qu'elle s'énonce clairement au seuil des Exercices.

L'amour, projet de Dieu pour l'homme


Certes, le projet de Dieu qu'Ignace expose au début des Exercices ne se dit pas en termes d'amour . « L'homme est créé pour louer, respecter, servir Dieu notre Seigneur, et par là sauver son âme ; les autres choses sur la face de la terre sont créées pour l'homme, et pour l'aider dans la poursuite de la fin pour laquelle il est créé D'où il suit que l'homme doit user de ces choses dans la mesure où elles l'aident pour sa fin et qu'il doit s'en dégager dans la mesure où elles sont, pour lui, un obstacle à cette fin. » Ainsi, au lieu de se laisser guider par des préférences humaines élémentaires et immédiates, l'homme est-il invité à se laisser travailler pour en venir à désirer et choisir uniquement ce qui le conduit davantage à louer, respecter, servir Dieu et, par là, à vivre (cf. 23).
Ce projet ne réapparaît plus textuellement dans la contemplation ultime Toutefois, vivre cette contemplation en suppose la mise en œuvre. La grâce qui y est demandée l'atteste : « une connaissance