Une autre fois, le jour où je célébrais l'office des saints martyrs Processus et Martinien, je méditais avec assez de profit sur les cinq plaies du Christ ; cela me venait à la vue d'un crucifix. Je contemplais ces plaies des mains et des pieds, et il me semblait qu'elles m'invitaient surtout à progresser en oeuvres et en désirs dans le bien, pour que notre travail se fît avec ferveur et se traduisît en actes pour que nous soyons pleins de zèle, et que sans craindre d'endurer des marches et des voyages à pied, nous vivions de manière que nos mains et nos pieds portent les marques de nos travaux, comme saint Paul l'a dit de son corps tout entier : "Je porte dans mon corps les marques de mon Seigneur."
Je remarquai que la plaie du côté fut faite après la mort du Christ : une fois que tout fut accompli et que furent accumulés tous les mérites du Christ, à la fin, le sang s'écoula pour nous avec de l'eau, répandant toute la richesse de ces mérites et nous enseignant que si nous ne mourions pas, nous ne pourrions pas goûter ces dons intérieurs qui parachèvent le salut des coeurs. C'est avant sa mort que nous furent d'abord ouverts, sources de trésors, ses mains et ses pieds ; et après le côté droit et le coeur.
Saint Pierre Favre, l'un des premiers compagnons d'Ignace (juillet 1543)
Mémorial, Desclée de Brouwer, coll. "Christus", 1960, p.379