Desclée de Brouwer, 2003, 263 p., 24 €.
 
Lanza del Vasto (1901-1981) est de ceux qui ont constitué le paysage spirituel, politique et intellectuel des années 40 à 70 en France et ailleurs. Vingt ans après sa mort, cette figure, dont on croyait tout savoir, apparaît ici sous un jour étonnamment nouveau.
Lanza est d'abord, indiscutablement, un pèlerin. Comme beaucoup de fondateurs, il n'a jamais tenu en place, et c'est d'ailleurs son ouvrage Le pèlerinage aux sources, dans lequel il relate son voyage en Inde (1937- 38), qui, après-guerre, le rendit célèbre. Ses futures pérégrinations dans le monde entier consistèrent pour l'essentiel, jusqu'à sa mort, à faire connaître l'enseignement non violent de son modèle Gandhi. Les auteurs montrent combien son sens du pèlerinage le libéra peu à peu de fortes tendances narcissiques.
Son statut de patriarche, Lanza l'a assumé très tôt, car, dès 1944, il se sentit porté à fonder la communauté de l'Arche afin de mettre son enseignement en pratique dans un radical retour à la terre. Toutefois, il s'avère davantage héritier des Pères du désert que des Pères de l'Église. En effet, après une formation philosophique Lanza, très peu intéressé par la pensée moderne, s'est forgé un art de contempler, de voir et de méditer très influencé par les leçons de Jean Cassien, tout en les adaptant au génie du bouddhisme (pratique du yoga, contemplation de l'arbre).
Enfin, les auteurs insistent sur le poète que fut Lanza. Mais là également, s'il publia quelques recueils, ce fut surtout pour donner un aspect sensible à son enseignement, très philosophique, comme Dante et Valéry, ses autres modèles. Plus avant, il ressort de cette biographie toute en finesse que Lanza del Vasto vécut toute sa vie, plus ou moins consciemment, en poète que sa vie elle-même fut un immense et splendide poème.