L’exhortation apostolique du pape François peut déconcerter par sa longueur, l’abondance des citations bibliques, la difficulté à lire des objectifs clairs et concrets. En voici quelques aspects qui peuvent aider.
Tout d’abord la joie qui ouvre l’exhortation. Il ne s’agit ni de ré-enchanter le monde ni d’afficher un sentiment qui faciliterait la mission. La joie, c’est le don gratuit que nous fait l’Esprit quand il ouvre notre mémoire, notre intelligence et notre cœur à Jésus-Christ. Sa présence en nous nous détend intérieurement et nous donne foi et confiance, même dans la peine et l’adversité. La joie est ce dynamisme intérieur qui nous pousse à agir, à nous tourner vers autrui, à aimer et partager, avec enthousiasme, mot qui revient souvent sous la plume du pape. C’est la joie de Zachée qui, recevant Jésus dans sa maison, passe de la prédation au partage.
L’évangélisation est donc d’abord un style de vie évangélique, personnel et communautaire. Il consiste à vivre tous les instants et aspects de notre vie en présence de Jésus-Christ, qui nous aime, nous appelle, nous pardonne. C’est pourquoi sans doute, le premier lieu de mission qui vient dans le texte est la paroisse avec les relations et responsabilités multiples qui tissent la vie d’une vraie communauté de foi. La qualité des relations et de l’accueil, le dynamisme de l’ouverture et de l’engagement disent la force de l’évangile qui la fonde. L’invitation récurrente à regarder la qualité du style de vie, de l’homélie, de la participation à la pastorale, de la beauté de la liturgie… souligne à quel point pour François la mission est œuvre de l’Esprit qui travaille le Peuple que Dieu s’acquiert.
Pour être évangélique et révéler le Christ présent aux hommes d’aujourd’hui, ce style de vie doit intégrer le dialogue avec toutes les cultures et religions, et les grands défis du monde actuel tel que les a discernés le dernier synode des évêques. Il nous faut dire non à l’économie de l’exclusion, à l’idolâtrie de l’argent qui gouverne au lieu de servir, à la disparité sociale cause de violence, au pessimisme stérile, au découragement et à la mondanité spirituelle, et même à la guerre entre nous, pour donner toute sa force et sa visibilité évangéliques au oui que l’Esprit nous fait dire aux défis de la sécularisation et de la famille, des cultures urbaines et de l’inculturation de la foi, d’une spiritualité missionnaire (§52-75). Dire oui aux relations nouvelles engendrées par le Christ est le chemin de l’intégration sociale des pauvres, tout particulièrement des migrants et réfugiés (§209-216), et d’un vrai dialogue social conduisant à la paix.
François convie l’Eglise, l’ensemble des baptisés, à une expérience spirituelle, à « sortir d’elle-même », de son confort, de son amour et de ses visées propres, pour se laisser conduire par l’Esprit qui la fonde. L’accompagnement personnel assure la marche et la croissance spirituelle de chacun au long du chemin (§169-173).