En ce qui suit, j'userai du terme « initiation » comme du plus commode pour ce que j'ai à dire. Je reconnais que cet emploi pose bien des questions que je ne peux malheureusement pas aborder dans les dimensions d'un article. Initiation désignera donc ce qui permet, en une culture donnée, à des jeunes de passer convenablement à l'âge adulte.

Le grand vide, le faux souci

Les adultes ont souci des jeunes. Souci, bien entendu, suspect – comme les jeunes se chargent de le leur faire sentir. N'est-ce pas de leur jeunesse plus ou moins manquée que les adultes ont en réalité souci ? Ne veulent-ils pas imposer leur loi, leurs propres désirs ? « C'est pour ton bien » veut dire souvent : « C'est ce qui me donnera, en toi, l'image de moi que j'ai manquée. » Et, même quand ils sont transis de bonne volonté, est-ce que les adultes, inconsciemment, n'ont pas une compulsion navrante à répéter ce qu'ils ont connu, même lorsqu'ils le critiquent et le désavouent ? Que les adultes s'occupent plutôt d'eux-mêmes. Après tout, le plus grand service que les parents peuvent rendre à leurs enfants – et des « éducateurs » à leurs « éduqués » –, c'est d'être « bien dans leur peau », solides, heureux de vivre, assez autonomes et bien vivants pour n'avoir pas besoin des enfants et des jeunes auprès d'eux et sous leur coupe. Car il convient que ces enfants et jeunes s'en aillent enfin, vivent leur propre vie – pas pour leurs parents ou leurs maîtres, mais pour eux et pour ceux à qui ils transmettront la vie.

Les « jeunes » arrivent justement à l'âge où ce que je viens de dire se manifeste avec force. Ils arrivent, ils sont au seuil qu'il leur faut franchir : quitter son père et sa mère, loi universelle, dite en la Bible, redite en l'Évangile avec une force choquante. (« Nul, s'il ne hait son père et sa mère… » Et, au jeune homme