Les récentes JMJ ont remis pour beaucoup en scène le catholicisme espagnol. Le visage que son Église a montré depuis des siècles a largement prêté le flanc aux caricatures : fermée sur elle-même, hautaine, conquérante, volontiers inquisitoriale, plus papiste que le pape, etc. Et de l’autre côté des Pyrénées, nous ne sommes pas les derniers à cultiver ces portraits à charge – oubliant un peu vite tout ce que nous devons à la tradition spirituelle et mystique espagnole : saint Dominique, saint Ignace, saint Jean d’Avila, sainte Thérèse d’Avila, saint Jean de la Croix et tous leurs innombrables disciples, sans compter les poètes et écrivains, peintres et musiciens, sculpteurs et architectes, qui ont cherché à favoriser l’école du recueillement. Quoi, ce peuple si bruyant, qui a fait de l’esprit picaresque, assez grossier, un art de vivre, ce peuple recèlerait donc aussi une profonde aspiration au silence, à rechercher mille et une méthodes pour se conformer à l’humanité du Christ ? Oui, un siècle et demi (1492-1640) d’inventions dans ce domaine et dans bien d’autres ont laissé des traces presque partout dans le monde, comme seuls en laissent les grands inspirés.
 
Ceux qui fréquentent patiemment le peuple catholique espagnol continuent à y trouver le pire (toujours à portée de la main) et le meilleur (une grande soif de prière exprimée pudiquement et alliée à un sens du service hors du commun auprès des pauvres et des malades). Les Espagnols d’hier, ceux que nous avons adoptés sous nos sphères, ne sont pas tellement différents de ceux d’aujourd’hui. Si l’on apprend à les écouter, les regarder, les côtoyer, nous retirerons beaucoup de leur inépuisable énergie qu’ils peinent tant à canaliser mais qui les rapproche de l’humanité franche et directe des personnages bibliques.
 

                 Yves Roullière