Toute chose ici-bas a son côté ombre et son côté soleil – son côté Yin et son côté Yang, si vous préférez. Depuis toujours, l'Église, faite de grandeur divine et d'humaines petitesses, n'échappe pas à cette loi universelle et, moins encore, l'Église au Japon qui, au cours de bientôt cinq siècles, a présenté remarquablement les aspects les plus contrastés de l'évangélisation. Au point qu'on a qualifié cette histoire paradoxale d'« énigme japonaise »1. Ne s'agit-il pas plutôt du mystère même de l'Église, et de l'Église en terre japonaise, avec ce qu'il a, il est vrai, de clair et d'obscur ?
L'auteur de ces lignes hésite cependant à proposer ses réflexions sur le mystère ecclésial qui se joue dans les Îles du Soleil levant. Il garde respect et gratitude pour la France qui fut sa mère, mais se sent plus fortement attaché à cette terre du Japon, dont il fit – vous allez sourire – son épouse… Aussi hésite-t-il à présenter au public les lumières et les ombres de sa « vie conjugale ». Il s'agit, en outre, et en premier lieu, non seulement d'un problème basé sur des données statistiques et des observations sociologiques, mais du mystère même de la « conversion », où la grâce nourrit et fortifie au plus secret du cœur humain cette « raison ardente » qu'est la foi, dans une « logique des profondeurs » qui défie aussi bien le psychologue que le théologien. Les Églises chrétiennes, on le sait, sont minoritaires en Extrême-Orient, les Philippines fort heureusement mises à part. Elles le sont particulièrement au Japon. Les catholiques, groupés surtout autour de Nagasaki et des grandes villes de l'île principale, au nombre d'un petit demi-million, voisinent avec les croyants des diverses dénominations chrétiennes, au total légèrement plus nombreuses. Sur une population de 127 millions d'habitants, le nombre de chrétiens se situerait autour de 1 %.
Voilà bien l'énigme japonaise, diront certains, ajoutant, non sans légèreté, que le peuple japonais est l'un des moins religieux qui soit au monde. Est-il