Ad Solem, 2008, 57 p., 10 euros.
Les questions les plus simples font les grands livres. Et sont aussi la signature des grandes âmes.
Au printemps 1963, Jacques Maritain vient de perdre successivement son épouse, Raïssa, et la soeur de celle-ci, Véra, deux compagnes de vie, de prière et de création depuis plus de soixante-dix ans. Sur la demande des Petits Frères de Jésus chez lesquels il s’est retiré, le philosophe propose une « libre causerie » sur « l’Église du ciel », en ce temps encore appelée « Église triomphante ».
Le texte a conservé l’immédiateté et la simplicité de ces entretiens : ce petit livre semble adresser directement la parole au lecteur. Celle de Jacques Maritain qui se fait ferme et douce, toute remplie d’hésitations à parler justement de ce que l’on oublie trop souvent, de cette communion qui nous unit à nos ancêtres, à ces vivants qui ont traversé la mort et sont devenus autrement vivants. De cet autre monde dont les chrétiens, paradoxalement, parlent si peu, même entre eux. « Et cependant l’autre monde est présent dans notre monde, il s’y invite comme la foudre, – invisiblement. » De cette conviction profonde est né un fil d’espérance dont ces pages sont cousues. Qui ne laisse rien de la douleur, si pudiquement inconsolable, loin du lourd devoir du « travail de deuil » que nous impose avec tant de hâte suspecte notre temps. Qui ne laisse sur le côté aucune prière, rendant à chacune sa place de pilier de la terre, car la prière est « une nécessité dans le monde tel que Dieu l’a fait ».
L’éditeur a su donner à ce texte admirable, au style rare, un accueil digne et ajusté. Un petit livre qui de bout en bout est un don joyeux, à l’image de la communion des Vivants, sur la terre comme au ciel.